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Les Echos, le 06/11/2024
Killian Cogan (Correspondant à Istanbul)
Alors que se tient, ce mercredi, le sommet de l’Organisation des Etats turciques à Bichkek, la Turquie n’a cessé de renforcer son poids économique dans la région dans un contexte de déclin russe lié à la guerre en Ukraine depuis 2022.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan est reçu par son homologue kirghiz Sadyr Japarov, mardi 5 novembre 2024. (Vladislav Nogai/Tass/SIPA Usa)
Dans les années qui ont suivi la chute de l’Union soviétique en 1991, la Turquie avait vu dans l’indépendance des républiques turcophones d’Asie centrale et du Caucase une opportunité pour y asseoir son influence en mobilisant un registre panturcique. Süleyman Demirel, le Premier ministre de l’époque, avait même célébré l’« arc turc qui s’étend de l’Adriatique à la muraille de Chine ». En 1992, la Turquie fondait alors TIKA, son agence d’aide au développement, dans le but de tisser des liens avec les pays de la région. Mais ces aspirations turques s’étaient heurtées à la réticence des pays d’Asie centrale qui, désormais émancipés du joug de Moscou, refusaient de s’assujettir à Ankara. L’influence turque en Asie centrale demeurait dès lors relative.
L’invasion russe de l’Ukraine fin février 2022 a toutefois impulsé un nouvel élan aux visées centrasiatiques de la Turquie. Soucieuses de réduire leur dépendance en armements vis-à -vis de la Russie, les républiques d’Asie centrale se sont volontiers tournées vers Ankara ces dernières années. Ainsi, alors que l’Ouzbékistan, le Kirghizstan et le Turkménistan ont fait l’acquisition de drones Bayraktar, Akinci et Aksungur, le Kazakhstan a, quant à lui, signé un accord de licence pour assembler des drones Anka en 2022.
Au-delà du secteur de la défense, la Turquie entretient aussi une présence important dans le BTP, notamment par le biais du géant de la construction Rönesans. Qui plus est, elle a doublé le volume de ses échanges économiques avec les républiques turcophones d’Asie centrale en huit ans, pour atteindre 11,5 milliards d’euros en 2023. Ankara est désormais l’un des premiers partenaires économiques de la région. Rien qu’avec le Kazakhstan, la première économie centrasiatique, ses échanges commerciaux étaient de l’ordre de 6 milliards en 2023.
« Soft power »
L’une des plateformes du poids croissant de la Turquie dans la région n’est autre que l’Organisation des Etats turciques (OTS), dont le 11e sommet annuel se tient ce mercredi dans la capitale kirghize Bichkek, et auquel participe le président turc Recep Tayyip ErdoÄŸan. Le but premier de cette organisation, fondée en 2009, était justement de promouvoir les liens économiques entre l’Asie centrale et la Turquie, notamment en facilitant le libre-échange entre les pays membres.
Mais, outre sa dimension économique, l’OTS cherche aussi à mettre en oeuvre des initiatives culturelles et éducatives conjointes au sein de l’espace turcophone, tel l’introduction du terme « turkestan » pour désigner la région, dans les programmes scolaires des Etats membres. Une autre initiative consiste par ailleurs à faire adopter un alphabet latin turcique commun, afin de faciliter la communication entre ces différents peuples turcophones. Autant de vecteurs turcs de « soft power ».
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