Moyen-Orient. En Turquie, “les montagnes de décombres” du séisme, une “menace” pour l’environnement et la santé

Courrier international, le 26/04/2023

Les opérations de déblayage battent leur plein dans les régions turques dévastées par le tremblement de terre du 6 février. Mais les gravats sont entreposés dans des zones sensibles, sans précaution et à la hâte, rapporte le “Washington Post”.

Une femme âgée regardant des camions et des excavateurs sur des monticules de gravats, le 28 mars 2023, à Samandag, dans la province du Hatay (sud-est de la Turquie), particulièrement touchée par le séisme du 6 février dernier. PHOTO BULENT KILIC/AFP
 

Plus de deux mois après le séisme qui a dévasté le sud de la Turquie, “les montagnes de décombres” qu’il reste à déblayer constituent “une nouvelle menace qui émerge” dans les zones sinistrées, écrit le chef du bureau d’Istanbul du quotidien américain The Washington Post.

Le tremblement de terre du 6 février et les répliques qui ont suivi ont tué plus de 50 000 personnes, et fait plus de 1 million de sans-abri. En effet, des milliers de bâtiments ont été détruits, et des dizaines de milliers d’autres, trop endommagés, sont en train d’être démolis.

Selon une estimation de l’ONU, la catastrophe a laissé derrière elle jusqu’à 210 millions de tonnes de gravats “mêlant matériaux de construction et détritus” pouvant dégager des substances toxiques, comme l’alertent des militants de l’environnement.

Des gravats stockés et jetés un peu partout

Dans la province du Hatay, l’une des plus touchées par le séisme, “on se plaint de plus en plus du manque de précaution des opérations de déblaiement”, écrit le Washington Post. C’est notamment le cas dans la localité de Samandag, située à l’embouchure du fleuve Oronte.

“En plus d’être entreposés sur la côte de Samandag, à moins de 1 mile [1,6 kilomètre] d’une réserve ornithologique, les gravats sont également jetés sur les bas-côtés des routes, dans des zones habitées, où les excavateurs soulèvent des panaches de poussière en retournant les débris.”

L’ornithologue et expert de la faune Emin Yogurtcuoglu a publié sur les réseaux sociaux des vidéos où l’on voit des pluviers, des oiseaux de rivage, dont l’habitat est menacé par les gravats.

İsviçre’deki cenazemden döner dönmez, ailemi, dostlarımı bile görmeden direkt Hatay’a, Milleyha’ya geldim. Birçok özel tür ile karşılaştık ama Çöl Çobanaldatanı’nı en son istediğim gibi çekebildim. Türkiye’de benden başka ilk kezCaner fotoğraflarını çekmiş oldu. pic.twitter.com/bZRur8R0dX

— Emin Yoğurtcuoğlu (@birddetectiveTR) April 19, 2023

Calendrier électoral

Selon les groupes de défense de l’environnement et des militants écologistes de la région, le processus de traitement de ces gravats “semble violer la réglementation” du pays.

Un habitant de Samandag s’inquiète :

“Il est dit qu’il y aura plein de cancers dans vingt ans dans le Hatay.”

Mais le vice-ministre de l’Environnement turc Mehmet Emin Birpinar balaie ces accusations. Dans un récent message sur Twitter, il explique que, dans la province du Hatay, des “zones de stockage temporaire” ont été définies “en accord avec les autorités locales”, assurant que toutes les précautions ont été prises.

📌Hatay,
En büyük yıkımın olduğu illerin başında geliyor.

Hâliyle yıkıntı atıklarının yönetiminde önem arz ediyor.

İlk etapta Geçici depolama alanlarının belirledik.

Bunları belirlerken yerelden de destek aldık.

Çoğunlukla belediyelerin kullandıkları alanları tercih ettik. pic.twitter.com/GQAIJFwYzp

— Prof. Dr. Mehmet Emin Birpınar (@Mbirpinar) April 16, 2023

Garanties insuffisantes pour la population locale, qui a exprimé son mécontentement en organisant des manifestations.

À Samandag, certains considèrent que ces opérations de déblayage étaient “menées avec une hâte inutile” en vue des élections du 14 mai prochain. Le président Recep Tayyip Erdogan, note le journal américain, sérieusement défié par l’opposition, a fait du rétablissement rapide des régions touchées par le séisme “un élément central de sa campagne”.
Courrier international

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