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La Tribune, le 22/08/2018
Par MC avec agences
La Russie commencerait à livrer à la Turquie son nouveau système de défense antimissile S-400 à partir de 2019.
Entre l’Iran, la Chine, la Russie et la Turquie, sans oublier la Corée du Nord – cinq puissances qu’il veut mettre au pas -, Donald Trump est actuellement au four et au moulin. Et le président américain ne va pas aimer, mais vraiment pas, les dernières déclarations du fabricant d’armes russe Rosoboronexport, qui a annoncé que la Russie commencerait à livrer à la Turquie son nouveau système de défense antimissile S-400 à partir de 2019, a rapporté l’agence de presse Interfax. Rosoboronexport a fait savoir que le paiement de ces équipements militaires se ferait en devises locales et non en dollars, a pour sa part indiqué l’agence Ria.
C’est le principal sujet d’inquiétude de Washington en Turquie. Les Etats-Unis ont d’ailleurs fait part à plusieurs reprises de leur préoccupation à l’idée que ce pays membre de l’OTAN dispose de systèmes de défense russes qu’ils jugent incompatibles avec la sécurité d’armes de fabrication américaine utilisées par l’armée turque. Les relations entre la Turquie et les Etats-Unis se sont très nettement dégradées après que Donald Trump a décidé de doubler les taxes douanières sur l’acier et l’aluminium turcs et a brandi la menace de sanctions supplémentaires. Cette décision a accéléré la chute de la livre turque face au dollar et le président Recep Tayyip Erdogan a accusé Washington de mener un « complot économique » contre son pays.
Les F-35 turcs en otage?
Le Congrès américain a voté début août un budget interdisant au Pentagone de remettre à la Turquie le moindre avion de combat F-35 tant qu’Ankara ne se serait pas engagé à ne pas finaliser ses négociations sur l’achat de S-400. Le Congrès américain a par ailleurs adopté en 2017 une loi, soutenue par les républicains et les démocrates, afin de punir la Russie pour son attitude en Ukraine et pour son ingérence dans l’élection présidentielle américaine. Cette loi, baptisée Caatsa (Counter America’s Adversaries Through Sanctions Act), impose des sanctions économiques contre toute entité ou pays qui conclut des contrats d’armement avec des entreprises russes. Elle menace donc la Turquie si elle confirme l’achat de systèmes de défense antiaérienne S-400.
Les Etats-Unis ont pourtant livré fin juin le premier F-35 à la Turquie, malgré les tensions croissantes avec ce pays. Mais ces appareils vont dans un premier temps rester aux Etats-Unis pendant toute la formation des pilotes turcs, un processus qui peut prendre un à deux ans selon le Pentagone. « Les Etats-Unis restent en possession de l’avion jusqu’à son transfert qui intervient normalement après un long processus de formation », a toutefois expliqué fin juin Wess Mitchell, chargé des relations avec l’Europe et l’Otan au département d’Etat américain. Il estimait que Washington pouvait juridiquement mettre fin à la transaction, notamment en lien avec « des préoccupations de sécurité nationale ».
« Une acquisition de S-400 aurait inévitablement des conséquences sur l’avenir de la coopération militaro-industrielle turque avec les Etats-Unis, y compris concernant les F-35 », avait affirmé Wess Mitchell. « Nous avons été on ne peut plus clairs, en privé comme en public: une décision sur les S-400 changera les relations américano-turques de manière difficilement remédiable ».
Washington tente de convaincre Ankara d’acheter le Patriot
Par ailleurs, les Etats-Unis tentent de convaincre la Turquie d’acheter leur système antimissiles Patriot au lieu du russe S-400. « L’objectif de notre point de vue est, avant tout, de faire en sorte que les systèmes achetés par nos alliés soient conformes aux relations stratégiques entre nous et nos alliés », avait récemment expliqué la chargée des affaires politico-militaires au département d’Etat américain, Tina Kaidanow. Et d’ajouter que « nous voulons qu’ils comprennent quels sont les inconvénients, les inconvénients réels et graves, de certains achats, notamment de l’acquisition de S-400 aux Russes, et qu’ils continuent plutôt de s’intéresser à nos systèmes pour donner la priorité à l’interopérabilité ».
« Dans le cas de la Turquie, ce sont, de notre point de vue, les Patriots, et nous essayons de fournir aux Turcs une vision de ce qu’on peut faire au sujet des Patriots », avait-elle précisé en juillet lors d’une conférence téléphonique avec des journalistes depuis le salon aéronautique de Farnborough au Royaume-Uni.
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