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Ersin Karabulut, auteur de BD : « Dire du mal de la Turquie à l’étranger, c’est comme trahir le pays »

L’Obs avec AFP, le 13/12/2025

Entretien  

Alors que le président turc Recep Tayyip Erdogan s’en prend à ses opposants, l’auteur de BD turc Ersin Karabulut se raconte en BD et partage ses inquiétudes pour son pays… et l’Occident.

Propos recueillis par  Renaud Février

 

 


La couverture de « Journal inquiet d’Istanbul Â», détail. DARGAUD

« Soyez prudents. Â» Voilà, en creux, le message que cherche à faire passer depuis plusieurs années le dessinateur turc Ersin Karabulut à travers ses albums, de fiction d’abord (publiés par Fluide glacial), et désormais aussi grâce à son autobiographie « Journal inquiet d’Istanbul Â» (Dargaud), dans laquelle il raconte une double ascension : la sienne dans l’univers de la presse satirique turque et celle, politique, d’un certain Recep Tayyip Erdogan, politicien turc d’un nouveau genre, qui deviendra maire d’Istanbul, Premier ministre puis président de la Turquie.

Alors que son principal rival à la prochaine présidentielle, le maire d’Istanbul Ekrem Imamoglu, arrêté en mars, risque actuellement 2 340 annnées de prison pour 142 infractions, l’auteur de BD turc Ersin Karabulut nous partage ses inquiétudes pour son pays, pour la presse satirique… et pour l’Occident.

 

Comment vous présenteriez-vous à des lecteurs français qui, peut-être, ne connaissent pas encore vos albums ?

Ersin Karabulut Vous êtes adorable. Vous dites Â« peut-être qu’ils ne vous connaissent pas Â». Je serais déjà bien chanceux si quelques-uns de vos lecteurs savent qui je suis. Je suis né à Istanbul [en 1981] et je suis depuis vingt-huit ans caricaturiste et dessinateur de bandes dessinées. La Turquie a en effet une véritable tradition de magazines humoristiques depuis plus de cent cinquante ans.

Pour ma part, j’ai grandi avec des bandes dessinées, turques mais aussi étrangères, comme « Astérix Â» et « Tintin Â», et en comics « Superman Â» et « Spiderman Â». Puis je suis tombé amoureux des magazines humoristiques traditionnels. Je souhaitais faire partie de ce monde et dès le collège et le lycée, j’ai commencé à dessiner des caricatures et à les proposer à des magazines…

En 2007, j’ai cofondé mon propre magazine avec des collègues : « Uykusuz Â», qui signifie « insomniaque Â». J’en ai été le rédacteur en chef pendant des années. En 2016, mes dessins ont été publiés en France pour la première fois, par « Fluide glacial Â», d’abord mensuellement, puis sous la forme de recueils. Et en 2022, j’ai commencé à écrire la série autobiographique « Journal inquiet d’Istanbul Â».

 

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L’auteur turc Ersin Karabulut. RITA SCAGLIA

 

Vous êtes très critique avec le pouvoir turc. Vous considérez-vous comme un artiste ou comme un militant anti-Erdogan ?

Oh non, je ne suis pas un militant. Je ne me considère même pas comme une personnalité politique. Je suis politique autant que nécessaire, car la politique en Turquie n’a rien à voir avec celle des pays occidentaux, disons plus « démocratiques Â». La politique, ici, en France me paraît encore assez éloignée des gens, mais, en Turquie, après vingt ans de règne d’Erdogan, elle affecte désormais directement et concrètement nos vies. C’est pour cela que nous nous sommes tous retrouvés dans la rue pour manifester.

Mais, je ne me considère pas comme un intellectuel ni comme un penseur. Je suis beaucoup moins ambitieux. J’aime dessiner. Et j’ai des choses à partager : je veux tirer la sonnette d’alarme pour les pays occidentaux en m’appuyant sur mon expérience en Turquie. Le message que j’essaie de faire passer, c’est : Â« Soyez prudents. Un pays peut facilement glisser vers un régime oppressif. Â»

 

En France, vous avez d’abord publié des albums de fiction, avec « les Contes ordinaires d’une société résignée Â», puis cette série plus autobiographique et, donc, politique… Comment est né ce projet ?

Je pense que « les Contes ordinaires d’une société résignée Â» sont, en réalité, encore plus politiques que « Journal inquiet d’Istanbul Â». Formellement, oui, c’est une compilation d’histoires fictionnelles. Mais c’est parce que j’ai été obligé d’utiliser des métaphores, ces histoires ayant été publiées en Turquie avant de l’être en France.

 

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Quand on est dans un régime oppressif, on vit avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. La satire est difficile. Il faut trouver des moyens de faire passer les messages sans se faire arrêter ou tuer. J’ai donc utilisé ces métaphores, car le régime ne s’y intéresse pas (ou ne les comprend pas), lorsqu’on les utilise intelligemment.

 

Est-ce que c’est plus facile depuis que vous ne vivez plus en Turquie ?

Hum, non… Quand le premier livre a été publié, j’étais encore en Turquie. Et il est vrai qu’il y a une étrange paranoïa dans le pays concernant les Â« forces étrangères Â». En résumé, cela ne pose pas de problème de se plaindre de la Turquie en Turquie, mais il est presque interdit de dire du mal de la Turquie à l’étranger. C’est comme trahir le pays.

J’ai reçu des messages du genre : Â« Comment peux-tu dire du mal de notre pays à des forces étrangères ? Â» C’est, encore une fois, de la paranoïa. Car en Turquie, je parlais au peuple turc. Et depuis la France, je continue à m’adresser à eux. Ce n’est pas vraiment différent, sinon que la distance avec la Turquie me donne plus de courage pour témoigner.

 

 » srcset= »https://focus.nouvelobs.com/2025/11/25/1071/200/1900/1900/630/630/75/0/f54c235_upload-1-y66piim23mfk-page-4.jpg 1x, https://focus.nouvelobs.com/2025/11/25/1071/200/1900/1900/1260/1260/50/0/f54c235_upload-1-y66piim23mfk-page-4.jpg 2x » alt= »« Journal inquiet d’Istanbul Â» (Dargaud). » width= »564″ height= »564″>  « Journal inquiet d’Istanbul Â» (Dargaud). DARP-HORS COLL

 
Vos albums sont autobiographiques mais il y a un autre personnage principal : Recep Tayyip ErdoÄŸan, l’actuel président de la Turquie… Comment le décririez-vous ?

Il est important de comprendre qu’Erdogan est le résultat, et non pas la cause, de nos problèmes en Turquie. C’est le résultat des problèmes de notre système éducatif, de nos croyances, de nos dogmes, etc. Lorsqu’il est arrivé au pouvoir début 2000, j’étais sceptique. Je me disais : c’est un type de politicien différent des précédents, car ceux de mon enfance, on l’oublie souvent, étaient beaucoup plus Â« soft Â», plus souples. Le Premier ministre Turgut Özal [de 1983 à 1989, NDLR] allait dans les talk show, s’amusait avec les imitateurs…

Ça n’arrivera peut-être plus jamais en Turquie… Evidemment, il y avait déjà de premiers signes lorsque Erdogan est arrivé aux affaires, mais, à l’époque, on se disait : « C’est une personne différente, certes, mais la Turquie, c’est la Turquie. On a de l’amour. Ce ne sera pas comme l’Irak, avec Saddam Hussein ! Â» Malheureusement, au fil des années, il a gagné en pouvoir et en popularité….

 

 

A titre personnel, et ce n’est pas une insulte, je pense qu’il est malade. Erdogan a besoin d’une thérapie, d’une thérapie sérieuse. Malheureusement, je ne pense pas que quiconque puisse le lui proposer car il serait tellement en colère. Mais si j’étais à sa place, je réunirais une dizaine de thérapeutes et j’engagerais une conversation avec eux pour devenir une personne meilleure, plus heureuse.

Nous, les Turcs, nous sommes tellement lassés de lui. Personnellement, je n’en peux plus de le voir, de le dessiner, de l’écouter… C’est une personnalité dont la Turquie et le peuple turc doivent se débarrasser au plus vite ! Par des moyens démocratiques, évidemment.

 

Est-ce que c’est un bon personnage de BD ?

[Rire] Oui ! C’est un dur à cuire et un bon méchant. Et pour l’instant, il est en train de gagner contre les héros…

 

Portrait chinois du dessin d’Ersin Karabulut

Dans ta bulle… Quel dessin pratiques-tu ?

Ersin Karabulut Je n’essaie pas de m’en tenir à un style de dessin particulier. Il y a, bien sûr, des styles que j’apprécie davantage, mais je pense que ce qui définit un style, c’est l’histoire, ou le message, qui est porté par le dessin. J’aime donc changer de style de dessin selon le contexte. Cela peut être un dessin anatomique très sérieux, ou très cartoonesque si nécessaire. J’aime le contraste entre ces deux styles, c’est pourquoi j’ai même tendance à les utiliser tous les deux dans mes livres, en fonction des passages de l’album.

Dans ta bulle… Quelle couleur domine-t-elle ?

Je crois que c’est le violet que j’utilise le plus, pour les ombres. Car j’aime donner du volume aux dessins. Je les aime plus tridimensionnels : façon cartoon, certes, mais avec des ombres et des éclairages. Je vois un peu mes dessins comme des marionnettes. C’est pourquoi je suis un peu obsédé par leur volume. Parfois, j’essaie de m’en passer, mais je me réveille le matin, je consulte la page que j’ai faite la veille et je me dis : Â« Ã‡a manque de violet ! Â» S’il m’est demandé une page en couleur, c’est donc celle qui domine. Mais je crois que je préfère le dessin en noir et blanc. Si j’avais plus de temps et pas de délais à respecter, je dessinerais uniquement à l’encre. Mais je n’ai pas ce luxe…

Dans ta bulle… Quel personnage préfères-tu dessiner ?

Je crois que j’aime dessiner la laideur de toute chose et donc de mes personnages. Pas dans un sens insultant, non, mais j’aime découvrir et retranscrire dans mes dessins la laideur ou, devrais-je dire, les côtés sombres des personnages, qu’il s’agisse de moi-même ou d’autres protagonistes. Je dis de moi-même car pendant vingt ans, chaque semaine, j’ai dessiné des strips autobiographiques en Turquie. C’est donc mon propre personnage que j’ai le plus l’habitude de dessiner. Ce qui est drôle, c’est qu’on change avec les années, on vieillit, mais mon personnage lui ne varie pas tant que cela… C’est cocasse car certains lecteurs, en dédicaces, me disent Â« Ce n’est pas vous, n’est-ce pas ? Â» Je dois donc leur certifier qu’il s’agit bien de moi… En même temps, il est vrai que plus je m’éloigne de mon dessin, plus le moi dessiné devient un personnage à part entière.

Le second personnage que j’ai dessiné le plus en vingt ans, c’est évidemment Erdogan. Je l’ai tellement dessiné, à la une de nos magazines notamment, que j’ai même dû trouver des raccourcis pour le dessiner rapidement : avec cette moustache, très courte, qui est presque devenue un symbole des islamistes politiques en Turquie, tout comme cette drôle de veste à carreaux.

Dans ta bulle… Quels auteurs convies-tu ?

Oh, j’ai eu beaucoup d’inspirations. J’ai grandi avec des versions pirates de bandes dessinées franco-belges, comme je le raconte dans le tome I de « Journal inquiet d’Istanbul Â» : « Tintin Â», « Astérix Â», etc. et aussi des bandes dessinées de super-héros comme Spiderman et Superman. Puis, plus tard, je me suis davantage inspiré de Charles Burns, Robert Crumb, Art Spiegelman ou Marjane Satrapi bien sûr. Et de nombreux artistes turcs, peu connus à l’étranger, mais brillants comme Kemal Aratan, Bülent Üstün, Memo Tembelçizer, İlban Ertem, Kenan Yarar, Ergün Gündüz, Engin ErgönültaÅŸ, Bülent ArabacıoÄŸlu, Serdar Gilkal, ou encore Suat Gönülay… C’est vaste !

Dans ta bulle… Quelles idées prédominent ?

Je pense que je me considère davantage comme un communicant et un conteur d’histoire que comme un dessinateur, car le dessin n’est pour moi qu’un outil pour transmettre des idées. Mon dessin n’a jamais été aussi sophistiqué, ni celui d’un génie. Mais il me suffit pour faire passer les messages que je souhaite exprimer.

Comme je l’ai dit plus tôt, ce qui m’intéresse ce sont nos côtés sombres. Je pense qu’il est bon de s’inviter les uns les autres à se montrer ce Â« dark side Â» avec honnêteté, ce qui, selon moi, nous permettra de progresser en tant que personnes. C’est, en quelque sorte, le manifeste éthique de mon art.

 

Dans vos albums vous racontez deux ascensions en parallèle : la vôtre, en tant que dessinateur, et celle d’Erdogan, au pouvoir… Sont-elles liées ?

C’était en même temps : nous avons commencé à bien vendre notre magazine, les ventes atteignaient presque 100 000 exemplaires par semaine et j’ai commencé à devenir populaire à 22, 23 ans. Erdogan est arrivé au pouvoir à la même époque et lui aussi était une personnalité pleine d’énergie.

Je ressens cette connexion. Comme je le raconte dans le livre, un jour, j’étais au lycée et je l’ai vu à un défilé militaire. Il avait une sorte d’aura, une énergie de star. Comme j’avais, d’une certaine manière, cette même aura, je me suis dit que nous étions de bons personnages à confronter. Car les deux personnages se rencontrent, à travers les dessins, les procès…

 

Le contenu de votre vie, de vos albums, est souvent difficile, parfois douloureux. Mais, vous ne vous départez jamais de votre humour…

Oh non ! Ma vie est fantastique. Je l’aime ! Il y a juste des moments où je me sens désespéré… Mais j’essaie d’être réaliste. J’essaie de faire face aux problèmes que nous pouvons rencontrer. Il y a quelques mois, le maire d’Istanbul a été arrêté [Ekrem Imamoglu, principal rival du président turc Recep Tayyip Erdogan]. Il est en prison maintenant, sans aucune preuve contre lui. L’opposition était sidérée : Â« C’est impossible. Comment est-ce que cela a pu arriver ? Â» Mais… c’est arrivé ! Vous voyez ce que je veux dire ? C’est donc, je pense, une bonne chose d’avoir de l’espoir, d’être fort et d’œuvrer pour le bien. Mais il faut savoir prendre en compte le projet et le personnage : comme je l’ai dit, je pense qu’Erdogan est perturbé. Il a un ego démesuré. Il ne supporte pas d’être vaincu. Il est obsédé par ça !

Dans ce contexte, je pense que l’humour est nécessaire. Il fait partie de notre essence, en tant que Turcs, et de notre histoire : le premier périodique humoristique en Turquie date des années 1860. On a tellement de problèmes au quotidien… Quand on regarde les infos turques en ce moment, en une heure, on peut voir plus de choses folles qu’en un an en Suède ou ailleurs. C’est vraiment affreux. Et je pense donc que l’humour est un mécanisme de défense. Pour vivre avec, on se moque. Les Turcs trouvent toujours des moyens de se moquer d’eux-mêmes. Et on trouve des solutions. C’est ce que je fais aussi. Donc… je suis quelqu’un de super heureux, en général.

 

 » srcset= »https://focus.nouvelobs.com/2025/11/25/1089/226/1860/1860/630/630/75/0/70ce49c_upload-1-47uizzpmagwq-page-17.jpg 1x, https://focus.nouvelobs.com/2025/11/25/1089/226/1860/1860/1260/1260/50/0/70ce49c_upload-1-47uizzpmagwq-page-17.jpg 2x » alt= »« Journal inquiet d’Istanbul Â» (Dargaud) » width= »564″ height= »564″>  « Journal inquiet d’Istanbul Â» (Dargaud) DARP-HORS COLL

 

Avec vos albums, vous tirez la sonnette d’alarme sur le risque, aujourd’hui, d’être dessinateur de presse, face aux extrémistes. Un risque en Turquie, mais aussi en France…

Je ne suis pas en position de dire aux Français : Â« Il y a des gens dangereux qui peuvent venir dans vos bureaux et vous tirer dessus. Â» Parce que Â« Charlie Hebdo Â», c’est arrivé ici, pas en Turquie ! Mais je savais déjà pertinemment, pour ma part, jusqu’où les fondamentalistes étaient capables d’aller pour leur cause. Parce qu’en 1993, des islamistes ont incendié un hôtel entier à Sivas [Anatolie] et tué 33 poètes et auteurs célèbres. J’avais 12 ans et j’avais alors réalisé quelles proportions cela pouvait prendre…

Mais ce qui était toutefois choquant avec « Charlie Hebdo Â», c’était évidemment que cela arrive ici, dans une démocratie. Et pourtant, c’est arrivé. Il y a toujours des gens qui ne tolèrent pas l’humour. Et puis maintenant, il y a internet qui permet à des gens qui n’étaient, a priori, pas censés voir notre travail (car il ne leur plaît pas), d’y accéder. C’est un danger désormais.

Aujourd’hui je regarde particulièrement ce qu’il se passe aux Etats-Unis avec Donald Trump. Cela m’inquiète encore plus que la France. Cette haine monte rapidement, exactement comme en Turquie. On a longtemps dit que la Turquie était une petite Amérique, maintenant on se dit que les Etats-Unis sont une grande Turquie. Les discours de Trump et Erdogan sont identiques : ce sont les mêmes phrases ! Erdogan utilise les références à la grandeur de l’Empire ottoman, Trump veut rendre sa grandeur à l’Amérique. L’un brandit le Coran, l’autre la Bible… On va dans la même direction.

C’est pourquoi je répète aux gens : Â« Ne pensez pas que la politique est loin de votre vie. Â»

 

Certains vous voient comme le fer de lance de la BD turque : l’occasion de vous demander comment va le 9e art en Turquie ?

Je suis loin d’être le leader de la BD turque. Je ne cherche même pas à faire preuve d’humilité : c’est vraiment très loin de la réalité. Il y a tellement de grands artistes que j’admire : ceux qui ont été mes maîtres et des artistes plus jeunes aussi. Ils n’ont juste pas eu le courage de s’exporter à l’étranger à cause de la barrière de la langue, de leur timidité, etc.

Durant les dernières années, la situation a toutefois beaucoup évolué. Quand les ventes étaient bonnes, il y a peut-être encore cinq ans, les artistes qui arrivaient à vendre une page dans un hebdomadaire parvenaient globalement à gagner leur vie. Ce n’est plus suffisant aujourd’hui car la presse écrite est en déclin, et l’inflation est très élevée en Turquie. Chacun doit composer avec cela, y compris les artistes. Beaucoup d’artistes, très talentueux, se lancent sur Internet, ou sur les plateformes de crowdfunding, etc. Les autres tentent de survivre avec les magazines restants ou essaient, comme moi, de s’implanter à l’étranger. Je me suis donné comme projet d’en faire connaître certains en France.

 

 

â—Š

 

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