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Le Figaro, le 07/08/2020
Par Anne Andlauer
REPORTAGE – Depuis 1934, la grande basilique chrétienne d’Istanbul accueillait ses visiteurs en terrain neutre, grâce à son statut de musée. Mais le 24 juillet, les autorités turques y ont organisé une prière musulmane, entérinant la reconversion islamique de l’édifice. Pour Erdogan, il s’agit autant d’exaucer un rêve personnel que de mobiliser ses électeurs.
Quelque chose cloche à Sainte-Sophie, qui n’a pourtant vu aucune messe depuis 567 ans. Mi-juillet, alors que l’édifice se muait en mosquée sur ordre du président Recep Tayyip Erdogan, le dirigeant de l’entreprise chargée de poser les tapis s’ouvrait à la presse turque de ses difficultés techniques. «Il y a un petit problème au niveau de la qibla», confiait Ali Riza Özkul, en évoquant la direction que prend la prière musulmane. Impossible, pour ses équipes, d’étendre la moquette parallèlement aux murs, car ceux-ci, semble-t-il, ne sont pas tournés vers La Mecque.
C’était rappeler, sans le dire, que Sainte-Sophie est née église, avant même que l’islam ne voie le jour au VIIe siècle. Sainte-Sagesse, de son vrai nom français (Hagia Sophia, en grec), ouvre ses portes en 537 sous le règne de Justinien, empereur romain d’Orient. Somptueuse, démesurée, elle irradie la chrétienté pendant plus de neuf siècles. En 1453, les Ottomans la conquièrent en même temps que Constantinople. On priera désormais Allah sous ses ors jusqu’à la chute de l’empire et même quelques années encore, au début de la République. En 1934, Mustafa Kemal Atatürk, fondateur du nouveau régime, «l’offre à l’humanité». Dans une Turquie presque épurée de ses minorités chrétiennes (génocide arménien puis expulsion des orthodoxes hellénophones d’Anatolie), sa transformation en musée est un geste de rapprochement à l’égard de la Grèce et des Occidentaux, avant d’être un symbole laïc. Il fait enrager les musulmans conservateurs, qui ne feront jamais le deuil de «leur» grande mosquée.
Esprit revanchard
«À la suite de Sainte-Sophie et surtout après la Seconde Guerre mondiale, on a vu de plus en plus d’anciennes églises byzantines devenues mosquées sous les Ottomans faire l’objet de programmes de restauration et rouvrir comme musées, explique l’historien de l’art Hayri Fehmi Yilmaz. Évidemment, cela a beaucoup dérangé les musulmans les plus pieux, pour lesquels ces monuments symbolisaient une victoire de l’islam sur la chrétienté.» Recep Tayyip Erdogan, qui a grandi dans ces milieux, incarne leur esprit revanchard. «De notre point de vue, Sainte-Sophie est devenue mosquée pour l’éternité lorsque Mehmet le Conquérant y a fait sa première prière, confirme Yunus Genç, président d’une association qui militait depuis un demi-siècle pour la révocation du statut de musée. Le sultan avait confié Sainte-Sophie à une fondation – qui existe toujours – pour qu’elle l’entretienne comme mosquée. En faire un musée, c’était une spoliation d’héritage.» Le Conseil d’État turc a soutenu la même conclusion dans un arrêt du 10 juillet, permettant la restitution de l’édifice à l’islam.
À l’instar des plus religieux, les Turcs les plus nationalistes ont aussi vu très tôt dans les mosquées «muséifiées» une forme de dépossession, comme si les désacraliser revenait à les «déturquiser». Au lendemain de sa première prière sous le dôme de Sainte-Sophie, Recep Tayyip Erdogan accusait les pourfendeurs de cette reconversion de ne «pas accepter qu’Istanbul (appartienne) aux Turcs et aux musulmans». «Erdogan ne personnifie pas une rupture, note l’historien Étienne Copeaux, spécialiste de la Turquie. Il est le produit d’une longue évolution qui a, dès le début, définit la nation turque comme musulmane. La transformation de Sainte-Sophie en mosquée est le point d’aboutissement du nationalisme turc, que je décris plutôt comme un national-islamisme.»
Pour illustrer cette symbiose entre nation et religion, Recep Tayyip Erdogan avait exigé un tapis de prière «100 % d’origine turque», alors même qu’on lui proposait une laine de Nouvelle-Zélande, de meilleure qualité. Ses fibres «pointent toutes vers La Mecque», a cru bon de préciser Ali Riza Özkul, le chef tapissier de Sainte-Sophie. L’ouvrage millénaire se retrouve donc, jusqu’à la fibre, certifié turc et musulman.
Recep Tayyip Erdogan, dont le parti dirige le pays depuis 2002, aura toutefois attendu 18 ans pour exaucer son «rêve de jeunesse» et islamiser Sainte-Sophie. Par pragmatisme, parce qu’il savait les conséquences d’une telle décision sur l’image de la Turquie dans le monde occidental et sur ses relations avec le voisin grec, il a longtemps rejeté l’idée. «Je n’ai pas perdu ma boussole au point de tomber dans ce piège», assurait-il encore le 18 mars 2019.
Une décision très politique
Sa volte-face s’explique notamment par les revers de son parti aux municipales de l’an dernier (Istanbul et Ankara, entre autres grandes villes, lui ont échappé). Alors que son électorat s’effrite, que sa formation se divise et que l’économie se dégrade, il avait besoin d’un symbole fort. «C’est une décision éminemment politique, un risque qu’il a pris dans l’espoir de mobiliser sa base électorale, que la crise économique rend de plus en plus mécontente», avance le journaliste politique Kemal Can. «Cela a aussi beaucoup à voir avec sa prétention à jouer un rôle de leader régional, plus précisément un rôle de leader du monde musulman sunnite», complète Soli Özel, professeur de relations internationales à l’université Kadir Has d’Istanbul.
Il suffit de lire, pour s’en convaincre, le communiqué en arabe émis par la présidence turque au sujet de Sainte-Sophie. La «résurrection» de la mosquée y est décrite comme un «signe précurseur de la libération de la mosquée al-Aqsa» de Jérusalem. Dans sa version anglaise, le même communiqué raconte une tout autre histoire. «Les portes de Sainte-Sophie seront ouvertes à tous, étrangers ou locaux, musulmans ou non-musulmans», annonce-t-il d’emblée, qualifiant le monument d’«héritage commun de l’humanité.» Les autorités turques ont juré que les Å“uvres héritées de Byzance demeureraient visibles en dehors des heures de prière. «Je suis convaincu que l’État protégera encore mieux Sainte-Sophie maintenant qu’elle est mosquée, parce qu’il se l’est en quelque sorte appropriée, soutient Nurdogan Sengüler, un guide touristique dont les bureaux donnent sur l’ancienne basilique. Laisser qui que ce soit dégrader les mosaïques de Sainte-Sophie nuirait énormément à l’image du pays. Rassurez-vous, l’État ne l’autorisera pas», poursuit-il. Hayri Fehmi Yilmaz aimerait pouvoir en dire autant. «Je pense qu’il sera difficile de protéger l’héritage des deux périodes – byzantine et ottomane – aussi bien que lorsque Sainte-Sophie était musée, dans la mesure où certains musulmans pieux auront du mal à accepter de prier en présence de figures humaines», s’inquiète l’historien de l’art.
Les autorités turques estiment avoir réglé le problème en tirant des rideaux sur les mosaïques byzantines lorsque les fidèles se prosternent. Mais l’historien rappelle aussi qu’à partir du XVIIIe siècle, sous l’effet d’une réaction religieuse, les œuvres d’art chrétiennes avaient été couvertes de lait de chaux. «J’espère que nous saurons être pieux au sens des Ottomans du Moyen Âge (qui n’avaient pas touché aux mosaïques,NDLR). J’espère que les extrémistes ne gagneront pas.»
Son architecture inégalée, ses trésors millénaires et sa charge symbolique devraient faire de Sainte-Sophie un cas particulier, plaide Hayri Fehmi Yilmaz. Il admet qu’ailleurs, en Anatolie, la restitution au culte musulman de certains édifices a pu les protéger et, parfois, les sauver. Deux exemples, parmi d’autres: Sainte-Sophie d’Iznik (ancienne église convertie en mosquée en 1331, détruite pendant la Guerre d’indépendance turque en 1920, rouverte après restauration en 2011) et Sainte-Sophie d’Enez (mosquée à partir de 1455, dégradée par un séisme en 1965, dont la réouverture est prévue cette année). Sainte-Sophie de Trabzon, elle, est redevenue mosquée en 2013 après avoir été musée pendant 49 ans, comme sa grande sœur d’Istanbul. «Il n’est jamais question de transformer en mosquées des églises qui n’avaient pas été converties à l’époque de la conquête, précise l’historien. Il s’agit toujours de lieux qui ont été mosquées pendant des siècles et ne sont revendiqués par aucune communauté chrétienne, étant donné le très faible nombre de chrétiens qui vivent encore en Turquie.»
les derniers byzantins
Sous le fracas des protestations internationales, ce sont eux, les chrétiens de Turquie – quelques dizaines de milliers d’âmes -, les grands absents des controverses sur le statut de Sainte-Sophie. Les premiers concernés, les orthodoxes hellénophones, descendants des Byzantins (les «Roums»), ne sont plus que 1 800 à Istanbul, contre plus de 130.000 à la fin des années 1930. Ils ont été victimes de pogroms et d’expulsions tandis qu’en Anatolie, l’hémorragie avait eu lieu dès les années 1920, avec le départ forcé de plus de 1 million d’orthodoxes vers la Grèce dans le cadre d’un «échange de populations».
«Ceux qui restent sont des personnes âgées qui se souviennent qu’avant les pogroms de 1955, on lisait dans la presse turque des articles menaçant les Roums, raconte Mihail Vasiliadis, figure de cette communauté. Avec les débats récents sur Sainte-Sophie, on a vu réapparaître des articles similaires, qui ont apeuré les Roums et toutes les minorités.» À plus de 80 ans, Mihail est fatigué de ces disputes: «À mes yeux, quoi qu’ils en disent, Sainte-Sophie sera toujours un lieu au-dessus et en dehors des religions.»
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