La Turquie ne veut pas de confrontation avec Israël en Syrie, mais les frappes israéliennes répétées sur les installations militaires dans ce pays érodent la capacité du nouveau gouvernement à dissuader les menaces des ennemis, y compris celles du groupe État islamique (EI), a déclaré vendredi le ministre turc des Affaires étrangères.
Dans une interview en marge d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN à Bruxelles, Hakan Fidan a affirmé que les actions d’Israël alimentaient l’instabilité régionale en ciblant la Syrie, où le gouvernement du président Ahmad el-Chareh est un proche allié de la Turquie. « Nous ne voulons pas d’une confrontation avec Israël en Syrie, car la Syrie appartient aux Syriens », a déclaré M. Fidan, ajoutant que seuls les Syriens devraient décider de la sécurité de leur pays.
La Turquie, qui est membre de l’OTAN, a violemment critiqué Israël pour ses attaques à Gaza depuis 2023, affirmant qu’elles s’assimilaient à un génocide contre les Palestiniens. La Turquie a également demandé à se joindre à une plainte devant la Cour internationale de justice contre l’Etat hébreu, tout en interrompant tout commerce avec ce dernier.
L’engagement d’Ankara en Syrie
L’animosité entre les deux puissances régionales s’est étendue à la Syrie, les forces israéliennes frappant la Syrie pendant des semaines depuis qu’une nouvelle administration a pris le contrôle à Damas. La Turquie a qualifié ces frappes d’empiétement sur le territoire syrien, tandis qu’Israël a déclaré qu’il n’autoriserait aucune force hostile en Syrie.
En cette « période de transition », a poursuivi M. Fidan, la Turquie ne veut pas voir l’EI ou le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) profiter de « l’absence des forces régulières ». « Malheureusement, Israël supprime, une à une, toutes ces capacités qu’un nouvel État peut utiliser contre l’EI et d’autres attaques et menaces terroristes », a-t-il déclaré. « Ce que fait Israël en Syrie ne menace pas seulement la sécurité de la Syrie, mais ouvre également la voie à une future instabilité de la région », a ajouté le chef de la diplomatie turque.
Toutefois, si la nouvelle administration de Damas souhaite avoir « certaines ententes » avec Israël, qui, comme la Turquie, est un voisin de la Syrie, cela ne regarde qu’elle, a-t-il ajouté. La Turquie est devenue l’un des principaux alliés étrangers du nouveau gouvernement islamiste syrien. Pendant des années, Ankara a soutenu les rebelles qui constituent aujourd’hui l’essentiel du nouveau gouvernement, dans leur lutte pour renverser l’ancien président Bachar el-Assad.
La Turquie s’est engagée à contribuer à la reconstruction de la Syrie, des infrastructures jusqu’aux institutions de l’État, et à lui apporter un soutien politique dans les instances internationales. Elle a appelé à la levée totale des sanctions occidentales contre la ce pays pour que les efforts de reconstruction puissent commencer, tout en saluant la formation d’un gouvernement de transition à Damas.
Liens avec les Etats-Unis
Hakan Fidan, qui s’est entretenu la semaine dernière avec des responsables américains à Washington, a affirmé vendredi qu’il comprenait que l’administration du président Donald Trump était en train de revoir sa politique à l’égard de la Syrie et des sanctions qui lui sont imposées.
« Ils examinent le dossier syrien et comprennent qu’il est nécessaire de modifier la politique de sanctions parce qu’elle a été introduite pour un régime différent et une évaluation différente de la menace », a admis M. Fidan. « Nous avons maintenant une nouvelle Syrie. Je pense que cette nouvelle Syrie nécessite une approche différente », a-t-il déclaré, ajoutant qu’Ankara avait transmis son point de vue sur la question à ses alliés occidentaux.
Tout en souhaitant des liens plus étroits avec Washington sous Donald Trump et en soutenant son initiative visant à mettre fin à la guerre en Ukraine, la Turquie s’est également opposée à certaines des politiques de la nouvelle administration américaine, notamment un plan visant à prendre le contrôle de la bande de Gaza et à la transformer en « Riviera du Moyen-Orient ».
Interrogé enfin sur les menaces de frappes militaires américaines contre l’Iran proférées par M. Trump, le ministre turc a estimé que la diplomatie était nécessaire pour résoudre les différends et qu’Ankara ne voulait pas voir d’attaque contre son voisin iranien.
*Cet article est une traduction d’une information de Reuters parue en anglais.