Séismes meurtriers en Turquie : le système d’alerte Google a mal fonctionné

Ouest-France avec AFP, le 28/07/2025

Emma VILLEROY

Le 6 février 2023, la Turquie était frappée par un des dix séismes les plus meurtriers des cent dernières années. Google vient d’admettre que son système d’alerte, qui aurait dû prévenir dix millions de personnes, avait été défaillant.

Google a révélé que son système d’alerte contre les séismes n’avait pas fonctionné lors des tremblements de terre, qui ont fait plus de 55 000 morts et 100 000 blessés, dans le sud-est de la Turquie, le 6 février 2023. Dès cette année-là, une enquête de la BBC avait soulevé le problème. À l’époque, Google avait nié. Mais, le 17 juillet, un rapport, publié par le géant américain, revient sur ces dénégations.

Un « filet de sécurité mondial Â»

Il est encore impossible de prévoir les séismes, mais des systèmes essaient de limiter les coûts humain et matériel des catastrophes en alertant les gens seulement quelques secondes avant la secousse. Depuis 2020, Google développe le programme Android Earthquake Alerts, présenté comme un « filet de sécurité mondial Â», dans des pays dépourvus d’alerte. Étendu à 98 Ã‰tats sur 2,3 milliards de téléphones, le réseau doit permettre de détecter des vibrations pour évaluer la magnitude d’un séisme et alerter les utilisateurs. Mais dans le rapport sorti le 17 juillet, les chercheurs de Google confirment les conclusions de l’enquête de la BBC sur les dysfonctionnements lors des séismes en Turquie en 2023. Dans la revue Science, ils citent les « limites des algorithmes de détection Â», qui ont sous-estimé la magnitude des deux tremblements de terre. Au total, moins de 9 000 personnes ont reçu l’alerte maximale « Take Action Â», avec une alarme sonore, et quatre millions ont reçu un avertissement « Be Aware Â», plus léger et discret.

Parmi les nombreuses victimes, beaucoup dormaient dans des bâtiments qui se sont effondrés. Pour la BBC, « seule une alerte plus sérieuse les aurait réveillés Â». Avec le niveau le plus élevé, ils auraient bénéficié de « 35 secondes d’avertissement en plus pour se mettre à l’abri Â». Le rapport révèle que le système aurait dû générer 10 millions d’alertes « Take Action Â» pour les personnes les plus à risque, et 67 millions d’alertes « Be Aware Â» pour les personnes vivant plus loin de l’épicentre.

« ÃŠtre transparent sur l’efficacité Â»
Pour se protéger, Google affirme que son « filet de sécurité mondial Â» est complémentaire et ne remplace pas les systèmes nationaux. L’algorithme aurait aussi évolué depuis.

Des scientifiques mettent en garde les États contre ces technologies, qui selon eux ne sont pas fiables, et contre les entreprises privées qui seraient tentées d’en tirer profit. Pour Elisabeth Reddy, professeure à l’université Colorado School of Mines, Google a révélé le problème bien trop tard. « Il ne s’agit pas d’un événement mineur : des personnes sont décédées. Â» Harold Tobien, directeur du réseau de stations sismographiques Pacific Northwest Seismic Network, est du même avis. « Il est essentiel d’être transparent sur l’efficacité de tel système. Certains pays pourraient se dire : puisque Google s’en charge, je n’ai pas besoin de le faire. Â»

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