Les services de renseignement, qui avaient suivi le groupe à travers cinq villes du pays, ont trouvé en leur possession un système IMSI-catcher, un outil d’espionnage avancé qui simule une fausse antenne-relais. Celui-ci permet de s’interposer entre le réseau mobile de l’opérateur et l’appareil électronique surveillé, permettant notamment d’espionner les conversations ou les messages envoyés depuis l’appareil.

 

Un niveau de sophistication inhabituel

L’IMSI-catcher aurait été introduit en Turquie en pièces détachées, afin d’éviter d’attirer l’attention des douanes turques, relate le quotidien.

Le groupe aurait centré ses actions sur des responsables turcs et des réfugiés de la minorité ouïgoure. Turcophone, cette minorité musulmane installée dans la province du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine, a vu nombre de ses membres fuir le pays au fil des ans en raison de la répression dont ils sont victimes, pour se réfugier en Turquie.

Organisée autour d’un chef, un certain ZL arrivé cinq ans auparavant en Turquie pour préparer le terrain, la cellule d’espionnage s’autofinançait via le piratage des comptes bancaires de citoyens turcs, relate le site d’information panarabe Middle East Eye.

En 2024 déjà, les renseignements turcs avaient arrêté des réfugiés ouïgours présents en Turquie et soupçonnés de travailler pour le compte de Pékin en espionnant, possiblement sous la menace de représailles contre leurs familles demeurées en Chine, leurs compatriotes réfugiés.

“Il s’agit d’une grosse opération. Les autres agences de renseignement [opérant en Turquie] comme le Mossad, ont l’habitude de passer par des locaux, des détectives privés à qui, tout au plus, ils demandent de poser une balise GPS.”souligne le quotidien turc Posta. Avant d’ajouter :

“Cette fois, c’est un autre niveau d’implication et de déploiement technologique.”

“Risque de crise diplomatique”

L’affaire et son futur traitement judiciaire sont une petite épine dans le pied des relations entre Pékin et Ankara, qui prend soin de soutenir symboliquement la cause des Ouïgours sans risquer toutefois de déclencher les fureurs de la Chine − dont elle espère attirer les investissements.

Le 15 mai, l’université d’Istanbul a ainsi annulé, la veille de son déroulement, une journée de festival et de solidarité avec les orphelins ouïgours réfugiés en Turquie, invoquant un “risque de crise diplomatique” avec Pékin, rapporte le média en ligne turc dévolu à la cause des Ouïgours, Uygur Haber.

Une situation dénoncée au Parlement par le député d’opposition Bilal Bilici, qui a critiqué une annulation qui portait atteinte aux respects des droits de l’homme, à la réputation de l’université et à “l’honneur” de la Turquie.