ErdoÄŸan en Afrique : La voie multipolaire de la diplomatie turque

 Mediapart, le 11/11/2021 
 

Le blog de markkaye
 
 

Le voyage en Afrique du président Recep Tayyip ErdoÄŸan, qui a couvert trois pays, est le signe que la Turquie est déterminée à approfondir ses liens avec le continent. C’est la 28e fois au cours des 19 dernières années qu’ErdoÄŸan a foulé le sol africain. Cette fois-ci, il s’est rendu en Angola, au Nigeria et au Togo.

Cette visite s’inscrit dans le cadre d’une politique plus large dans laquelle la Turquie vise à s’engager activement en Afrique sur le plan économique. C’est un continent qui était négligé par la politique étrangère turque avant les gouvernements du Parti de la justice et du développement (AKP).

L’empreinte turque en Afrique était peu marquée avant ErdoÄŸan, mais après son arrivée au pouvoir, de nombreuses ambassades et consulats ont été ouverts sur le continent, Turkish Airlines (THY) a lancé des vols directs vers des dizaines de destinations africaines et les relations bilatérales se sont comparativement développées. Cependant, l’hégémonie des puissances coloniales est encore visible, et ErdoÄŸan souhaite les enrayer.

La stratégie de la Turquie consiste à équilibrer l’influence croissante de la Chine sur le continent et à trouver sa propre place. À ce titre, la visite en trois étapes du président était l’occasion de nouer davantage de partenariats avec les économies africaines.

Dévoiler les détails

En Angola, sa première étape, ErdoÄŸan s’est adressé au parlement angolais et a déclaré que « le sort de l’humanité ne peut et ne doit pas être laissé à la merci d’une poignée de pays qui ont été victimes de la Seconde Guerre mondiale. » Il a déclaré que la Turquie embrassait tous les pays africains et a critiqué les approches orientalistes des pays occidentaux, décrivant la Turquie comme un « État afro-eurasien » construit à partir de liens historiques forts entre l’Empire ottoman et les royaumes africains.

Il est important de noter qu’ErdoÄŸan est un dirigeant politique qui a visité l’Afrique comme aucun autre dirigeant non africain auparavant, ce qui est la principale raison pour laquelle ce voyage a été suivi de près par la presse française.

Au cours des dix dernières années, les échanges commerciaux entre le Sénégal et la Turquie ont été multipliés par 16. Les entreprises turques ont de grands projets d’infrastructure dans le pays. Non seulement au Sénégal, mais aussi au Niger, par exemple, un accord de coopération a été signé qui permet à Ankara d’avoir une présence militaire dans le pays et, lors de cette visite au Togo, des accords ont été signés concernant la coopération en matière de défense.

Il existe d’autres pays africains avec lesquels la Turquie s’est engagée de manière inédite, comme l’Éthiopie, où la Turquie est le deuxième investisseur. Le volume des échanges commerciaux d’Ankara avec l’Afrique a été multiplié par plus de cinq au cours des 20 dernières années, passant de 3,5 milliards de dollars (33,7 milliards de TL) à 20 milliards de dollars en 2020.

Succès diplomatique

Concernant la présence croissante de la diplomatie turque sur le continent, 31 nouvelles ambassades ont été ouvertes sous l’ère ErdoÄŸan. La visite du président turc doit être lue à la lumière de tous ces développements. Ce voyage est important pour les nouvelles opportunités de collaboration et de développement.

Je crois que la « voie multipolaire » de la diplomatie turque est toujours viable. Pour les pays africains, il subsiste des problèmes spécifiques avec des partenaires stratégiques comme les États-Unis et l’Union européenne, et la Turquie reste un acteur important dans la géopolitique occidentale.

La nation accorde une importance particulière à ces relations, qui ne doivent pas se faire au détriment de son engagement en Afrique ou en Orient. La Turquie s’efforce simplement d’être forte sur plusieurs plans géographiques. N’y a-t-il pas de problèmes ? Malheureusement, les problèmes sont nombreux, mais ils ne peuvent être surmontés que par une diplomatie multipolaire.

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