Diplomatie et reconstruction : l’axe Turquie-Syrie se renforce

Les Echos, 15/01/2025

Par Killian Cogan

Assaad Hassan Al-Chibani, le ministre des Affaires étrangères du gouvernement de transition en Syrie, s’est rendu ce mercredi en Turquie. (Bakr ALKASEM/AFP)

Le ministre des Affaires étrangères syrien s’est rendu mercredi en Turquie, partenaire de premier plan du nouveau régime. Si Ankara espère tirer profit de la reconstruction post-guerre civile, elle fait déjà face à la concurrence des monarchies du Golfe.

C’est une visite hautement symbolique. Près d’un mois et demi après la prise de Damas par les rebelles islamistes de Hayat Tahrir Al-Cham (HTC), le ministre des Affaires étrangères du gouvernement de transition syrien, Assaad Hassan Al-Chibani, s’est rendu ce mercredi en Turquie. Il était flanqué du ministre intérimaire de la Défense, Mourhaf Abou Qasra, et du chef des renseignements, Anas Khattab. Il s’agit là de la « première visite officielle dans la république de Turquie, qui n’a jamais abandonné le peuple syrien au cours des quatorze dernières années Â», a déclaré en turc le ministre Al-Chibani sur X.

Soutien de la première heure de HTC, qui a renversé le régime de Bachar Al-Assad avec l’appui de ses services de renseignement, Ankara entretient une proximité incontestable avec la nouvelle administration syrienne. A l’image de certains de ses membres qui ont des attaches en Turquie.

Tel Al-Chibani lui-même, qui, jusqu’à la chute du régime baasiste, poursuivait un doctorat en relations internationales à l’université Sabahattin Zaim d’Istanbul. Ou encore du nouveau gouverneur d’Alep, Azzam Al-Gharib, qui a, lui, suivi des études de théologie islamique en Turquie. On notera aussi que la cheffe du bureau des affaires féminines, Aicha Al-Dibs, bénéficie, pour sa part, de la nationalité turque.

Reconstruire routes et chemins de fer

Autant dire qu’Ankara dispose de solides canaux de communication avec les nouveaux tenants du pays, lui conférant de la sorte une position avantageuse dans un contexte de reconstruction post-guerre civile. Se posant en parrain de la nouvelle Syrie, le président Recep Tayyip Erdogan a ainsi annoncé fin décembre qu’il avait « demandé à chaque ministère turc de préparer des rapports sur la manière dont ils peuvent assister à la reconstruction [de la Syrie] en fonction de leurs domaines respectifs Â».

Le ministre de l’Energie, Alparslan Bayraktar, a annoncé qu’il prévoyait d’augmenter les exportations turques d’électricité de 220 mégawatts à 500 mégawatts dans les six prochains mois. Le ministre de l’Infrastructure et des Transports, Abdulkadir Uraloglu, a, de son côté, affirmé qu’il aiderait la Syrie à « reconstruire ses routes et ses chemins de fer Â». La semaine dernière, Ankara a par ailleurs envoyé deux navires générateurs d’électricité pour augmenter l’approvisionnement énergétique de la Syrie, en coordination avec le Qatar.

La Turquie cherche à profiter du contexte de reconstruction pour s’y attribuer un rôle économique de premier plan, notamment dans le secteur du BTP. Si elle est bien positionnée à cet égard, elle fait toutefois face à la concurrence des pays arabes, au premier rang desquels figurent les monarchies du Golfe. Avant de se rendre en Turquie, le ministre des Affaires étrangères Al-Chibani a d’abord effectué ces dernières semaines des visites en Arabie saoudite, aux Emirats arabes unis, au Qatar et en Jordanie. Or Riyad a également proposé d’aider à la reconstruction du pays, et de répondre à ses besoins énergétiques par le biais de livraisons de pétrole.

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