Depuis la chute du régime de Bachar Al-Assad, circuler le long de la frontière sud de la Turquie en voiture, c’est un peu s’inviter sans frapper dans la Syrie profonde, celle des petites gens, des travailleurs précaires, des familles modestes et des jeunes célibataires en quête d’un avenir meilleur. Tous ceux qui, au cours de ces treize dernières années, depuis le déclenchement de la guerre civile syrienne et de sa répression féroce, ont fui leur pays pour s’installer avec plus ou moins de bonheur chez leur voisin turc et qui ont décidé, aujourd’hui, de revenir chez eux, au plus vite, des sacs bourrés d’affaires à la main.
Ils sont là par centaines, agglutinés devant les postes-frontières d’Oncüpinar, Cilvegözü et Yayladagi, qui mènent à Alep, Idlib et Lattaquié. Les yeux brillants mais fatigués, ils patientent devant les officines mobiles des agents des services migratoires turcs, dépêchés pour la circonstance, encadrés par les gendarmes et quelques ONG venues distribuer vêtements chauds et thé. Après avoir enregistré leurs empreintes et obtenu le feu vert des services fiscaux d’Ankara, ils doivent signer une feuille dite de « retour volontaire ». Un document qui acte leur départ définitif de la Turquie.