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Le Monde, le 16/07/2021
Par Sasha Loizot
ENQUÊTE
A la suite de la répression qui s’est abattue après la tentative de coup d’Etat du 15 juillet 2016, 9 000 citoyens turcs ont déposé une demande d’asile en Grèce.
La capitale grecque s’est mise à l’heure d’été. Une chaleur moite a envahi les rues de la ville et dissuade les plus hardis de s’aventurer à l’extérieur. Ce n’est qu’en début de soirée, avec le retour de la fraîcheur, que les rues d’Athènes retrouvent un peu d’animation. Sur la place centrale de Syntagma, en contrebas du Parlement grec, la fontaine s’est transformée en lieu de rendez-vous idéal.
A quelques mètres de là, Hamdi est installé à la terrasse d’un café huppé de la place. Cet ancien juge de 38 ans est arrivé en Grèce il y a un peu plus d’un an, après avoir fui la Turquie. Au lendemain de la tentative de coup d’Etat du 15 juillet 2016, qui a ébranlé le pouvoir d’Erdogan, il a été soupçonné d’« appartenance à une organisation terroriste », pour sa proximité avec la confrérie de Fethullah Gülen – prédicateur musulman réfugié aux Etats-Unis, accusé par les autorités turques d’avoir fomenté le putsch –, à l’instar de centaine de milliers de personnes.
« Le soir du 15 juillet, j’étais en congé. Quand j’ai vu les lynchages qui avaient lieu contre les militaires, j’ai eu peur et j’ai décidé d’attendre là où j’étais. J’ai ensuite appris que j’avais été suspendu, puis limogé. La police s’est rendue à mon domicile, car il y avait un mandat d’arrêt contre moi », se souvient-il. S’ensuit une cavale de quatre années, au cours de laquelle il se cache dans différentes villes avant de se résoudre à traverser le fleuve Evros, frontière naturelle du Nord qui sépare la Turquie de la Grèce. Comme lui, 9 000 citoyens turcs ont déposé une demande d’asile en Grèce ces cinq dernières années.
Prouver son innocence
Dans la nuit du 15 au 16 juillet 2016, une fraction de l’armée – dont une majorité de gülénistes – s’est soulevée contre le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan. Les putschistes ont notamment bombardé le Parlement, kidnappé le chef de l’état-major et tenté d’assassiner le président Erdogan. De violents affrontements avec la population se sont soldés par 251 victimes civiles et près de 2 200 blessés.
Les autorités turques ont immédiatement organisé la réplique contre l’ensemble de la confrérie de Fethullah Gülen, rebaptisée « Organisation terroriste Fethullah Gülen » (FETO). Dans la foulée, le conseil des ministres a orchestré des purges tous azimuts dans les instances noyautées par la confrérie – notamment dans l’enseignement, la police, la justice et l’armée –, par la promulgation de décrets-lois durant les deux années de l’état d’urgence.
Tous les membres – réels ou supposés – de la confrérie en ont fait les frais. Mais les purges ont touché bien au-delà des rangs des responsables directs du coup d’Etat. Le bilan publié par le ministère de l’intérieur le 15 juillet 2020 fait état de plus de 125 000 licenciements dans la fonction publique, 280 000 gardes à vue et 95 000 peines d’emprisonnement.
Ironie du sort, l’ancien magistrat a vu l’appareil de justice se retourner contre lui. « Les deux principes de légalité du droit et de personnalisation de la peine sont violés. Je suis jugé pour avoir fait quelque chose qui n’était pas un délit [l’appartenance supposée à la confrérie] et je suis jugé pour un acte que je n’ai pas commis ! », développe Hamdi, dans une logique juridique implacable.
Pourtant, avec la psychose qui s’est emparée de la société turque dès le lendemain du coup d’Etat raté, les grands principes du droit ont été bien émoussés au sein des hautes instances judiciaires de Turquie. La présomption d’innocence mise entre parenthèses, les accusés ont été sommés de prouver leur non-implication dans la tentative de putsch. Dans le cas de Hamdi, une dénonciation anonyme et une affiliation à un syndicat ont fait office de preuves irrévocables de sa culpabilité.
« Vision du monde » bouleversée
Comme beaucoup de fidèles de la « Cemaat » (nom utilisé par la communauté Gülen), Hamdi a servi fidèlement l’appareil d’Etat pendant des années. « J’étais très nationaliste, sans doute trop, et cela passait par un réflexe, celui de protéger l’Etat avant les individus. Il y a cet adage célèbre : “Un mauvais Etat vaut toujours mieux qu’une absence totale d’Etat.” Mais ce qui est arrivé depuis le 15 juillet a bouleversé ma vision du monde », reconnaît-il avec contrition.
Comme Hamdi, Zeynep et Zafer sont arrivés en Grèce récemment. La première, ancienne professeure de russe âgée de 42 ans, est originaire d’une ville de la côte égéenne. L’autre, un ancien universitaire de 32 ans, vient d’une ville kurde de l’est du pays. Ils n’étaient pas destinés à faire connaissance, mais les événements en ont décidé autrement. Depuis leur rencontre, ils s’entraident et tentent de monter un petit commerce de vêtements pour survivre.
Le crime de Zeynep est d’être mariée à un homme membre de la confrérie. Elle a fait plusieurs mois de prison pour « appartenance à une organisation terroriste » en raison d’un compte ouvert, il y a une dizaine d’années, auprès de la banque Asya. A l’instar de l’usage de la messagerie cryptée ByLock, être client d’Asya a été accepté comme une preuve par les tribunaux turcs. « En Turquie, on dit souvent : “Quand les géants s’affrontent, c’est l’herbe qui est piétinée” », résume Zafer, désabusé, en une métaphore devenue un topos de l’imaginaire politique en Turquie. « Pourtant, tous les gens entre 25 et 50 ans ont eu des liens avec la Cemaat ! », lance-t-il.
« Nous leur avons donné tout ce qu’ils ont demandé », avait lancé Recep Tayyip Erdogan lui-même en 2013. La collaboration entre l’AKP et la confrérie de Fethullah Gülen est, en effet, largement documentée. Pourtant, dès que l’opposition demande des comptes au gouvernement sur l’épineuse question de l’aide apportée par le mouvement religieux au parti islamo-conservateur dans son ascension du pouvoir au cours de la décennie 2000, les menaces pleuvent.
Limogeage par décret-loi
Les injustices subies par certains membres de la confrérie après la tentative de coup d’Etat ne font pas pour autant oublier l’infiltration dans les institutions et le manque de transparence dans le fonctionnement du groupe. Située à droite de l’échiquier politique, la confrérie s’est, en effet, illustrée comme l’un des acteurs incontournables de la scène politique turque, comme l’ont prouvé les procès Ergenekon et Balyoz entre la fin des années 2000 et le début de 2010, orchestrés par des gülénistes pour affaiblir l’influence politique de l’armée face à l’AKP.
La période d’état d’urgence, après le putsch avorté, a aussi permis à Recep Tayyip Erdogan d’éliminer ses opposants de gauche et d’asseoir un peu plus son pouvoir. Les personnes accusées d’appartenance à FETO ne sont d’ailleurs pas les seules à avoir trouvé refuge en Grèce, mais l’exil n’a pas pour autant rapproché les ennemis de Recep Tayyip Erdogan.
« Les juges qui ont condamné mon mari à la prison pour ses activités politiques avec les communistes sont des gülénistes ! », dénonce Emriye Demirkir, ancienne enseignante en histoire. Syndicaliste, elle a été limogée par le décret-loi n° 686 de février 2017, un nombre qui l’a condamnée à une mort civile. « Je vais finir par me le faire tatouer sur le bras », plaisante-t-elle.
Désormais, elle est installée à Athènes, où elle a rejoint son mari, lui-même réfugié politique. Elle a attendu trois ans avant d’obtenir son statut de réfugiée en Grèce, mais elle reconnaît avoir bénéficié de la solidarité des socialistes grecs. Pour réparer l’injustice, elle envisage d’envoyer son dossier à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), mais la création d’une commission d’évaluation de l’état d’urgence – une instance d’appel pour les personnes licenciées par décret-loi – bloque toute possibilité : « L’Europe a reconnu cette commission, alors qu’elle n’a été créée que pour nous empêcher d’aller à la CEDH… C’est une honte ! », dénonce-t-elle avec colère.
Cinq ans après les faits, des zones d’ombre persistent toujours sur l’enchaînement des événements de la nuit du 15 au 16 juillet 2016. Pour Zafer, même si son innocence finit par être reconnue, rien ne pourra jamais réparer le préjudice subi : « Je ne retournerai jamais vivre en Turquie, car je suis convaincu que ce pays ne changera jamais. »
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