Archéologie : une mystérieuse basilique antique immergée dans le lac d’Iznik en Turquie

Historia, le 28/05/2025

Par Véronique Dumas

En 2014, lors d’un survol du lac d’Iznik, en Turquie, les vestiges d’une église de plan basilical sont apparus sous la surface. Cette découverte extraordinaire a donné lieu à une enquête de longue haleine, mobilisant une équipe internationale et pluridisciplinaire de scientifiques, racontée dans un documentaire à voir jusqu’au 5 juin sur histoire.tv.

 
Reconstitution numérique de la basilique d’Iznik, en Turquie. Image tirée du documentaire «Iznik, les mystères de la basilique engloutie» de Pascal Guérin. (Les Batelières Productions)

Vues du ciel, les ruines d’un édifice de plan basilical sont très distinctement visibles sous les eaux du lac d’Iznik, situé à 200 km d’Istanbul. Depuis quelques années, elles affleurent de plus en plus nettement à mesure que baisse le niveau de l’eau à cause du réchauffement climatique. Cette mystérieuse basilique a été localisée en 2014 à la faveur d’un survol de la région dans le cadre d’un inventaire culturel. Elle a aussitôt suscité l’intérêt des archéologues, intrigués par la présence de tels vestiges.

Quand cette basilique a-t-elle été construite ? Par qui ? Pour quelles raisons ? Quand a-t-elle été détruite et de quelle manière ? Pour y répondre, une équipe internationale et pluridisciplinaire de scientifiques a mené, sous la houlette du professeur Mustafa Şahin de l’université Uludağ, une longue et minutieuse enquête, sous l’eau et en surface, en Turquie, en Italie, en Angleterre et en France. Elle est retracée dans le passionnant documentaire Iznik, les mystères de la basilique engloutie.

Une nécropole sous la basilique

Il est apparu très rapidement que cet édifice à trois nefs, long de 41 m et large de 18, était une basilique byzantine. Le fait qu’elle se trouve sur le site de l’ancienne Nicée a immédiatement suscité la curiosité des historiens. A-t-elle accueilli le premier concile de l’histoire de la chrétienté, qui s’est tenu dans la ville sous le règne de l’empereur Constantin en 325 apr. J.-C. et dont le lieu exact est inconnu ? Pour mener l’enquête, les archéologues se sont équipés de combinaisons de plongée.

Ils ont ainsi pu explorer le site, dont la profondeur varie entre 1,50 m et 5 m. Les premières recherches sous-marines, rendues difficiles par la présence de sédiments en suspension, ont révélé la présence étonnante de nombreuses tombes. La réapparition de ces sépultures, indiquant l’existence d’une nécropole sous l’édifice, n’explique pas pourquoi la basilique a été engloutie.Un séisme historique
Pour l’archéologue-sismologue Julia de Sigoyer de l’université de Grenoble, il ne fait aucun doute au vu de l’activité sismique intense attestée en Turquie – un pays situé au croisement de trois plaques tectoniques –, qu’un tremblement de terre de forte magnitude a provoqué la destruction de l’édifice. L’étude des données bathymétriques (la cartographie des fonds sous-marins) a en effet révélé l’existence de deux segments de failles tectoniques, jusqu’alors inconnus. Ces éléments ont été complétés par les analyses de carottes sédimentaires prélevées au fond du lac. Celles-ci ont montré des traces caractéristiques, laissées par plusieurs tremblements de terre survenus entre le IVe et le XIe siècle. Mais quel est celui qui a détruit la basilique et provoqué un tsunami ? En déterminant sa date précise – que nous ne révèlerons pas ici –, les chercheurs sont parvenus à reconstituer les éléments de cette énigme historique.

Au cours de ce film, riche en rebondissements, les recherches des différents spécialistes prennent, au-delà de l’intérêt archéologique et historique, une autre dimension. Connaître les circonstances de la catastrophe qui a disloqué la basilique – l’une des premières églises du christianisme –, permet de comprendre l’activité de la faille nord anatolienne, toujours potentiellement active, sur laquelle se trouve Iznik. Et ainsi d’anticiper un nouveau séisme majeur dans une région qui compte faire des vestiges de la basilique immergée une attraction touristique.

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