C’est l’une des grandes questions qui animent l’Europe des Vingt-Huit : comment sauver l’accord sur la migration signé en mars avec la Turquie alors que les relations entre Bruxelles et Ankara se sont fortement dégradées, à la suite de la dérive autoritaire du président Recep Tayyip Erdogan ? D’autant que les négociations sur le processus d’adhésion et la libéralisation des visas sont au point mort.
Mardi 12 décembre, les ministres des affaires étrangères n’ont, pour la première fois depuis douze ans, pas adopté les conclusions sur des questions d’élargissement. Le ministre autrichien Sebastian Kurz a refusé le projet de déclaration conjointe concernant les négociations d’adhésion avec Ankara, timidement relancé lors de l’accord sur la migration. Vienne réclamait un arrêt du processus.
La Turquie ne devrait pas non plus obtenir rapidement la libéralisation des visas, promise à ses ressortissants voulant se rendre dans l’espace Schengen. Les Européens avancent que les autorités turques n’ont pas amendé leur -législation antiterroriste. Même si elles se conformaient aux demandes de Bruxelles, un accord resterait difficile, dans le contexte, notamment, de la présidentielle française.
Dialogue indispensable
Comment, dès lors, éviter la rupture des relations, une menace qu’agite régulièrement M. Erdogan en promettant de remettre en question l’accord de mars sur les réfugiés ? Cet accord, qui a contribué à réduire les passages de demandeurs d’asile de Turquie vers les îles grecques de la mer Egée, est considéré comme un succès du point de vue des Européens.
Pour éviter une rupture, Donald Tusk, le président du Conseil européen, a annoncé la tenue d’un nouveau sommet UE-Turquie – qui ne devrait pas avoir lieu avant avril 2017 – pour préserver un dialogue jugé indispensable. Ce sommet pourrait fournir l’occasion de rechercher une position commune sur la Syrie et surtout de relancer l’union douanière, fruit d’un accord signé en 1995 et qui élimine les droits de douane pour les marchandises transitant entre la Turquie et l’UE. Ankara tient beaucoup à cette union, alors que son économie traverse une passe difficile avec une récession brutale, un effondrement de la livre et un net recul du tourisme.
La Commission réfléchit à une relance de cet accord douanier, qui pourrait éventuellement être étendu aux produits agricoles et aux services. Cet accord pourrait donc servir de substitut au processus d’adhésion et maintiendrait un canal de dialogue.