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Le Parisien – 23/12/2014
Une commission parlementaire turque a décidé de reporter au 5 janvier son vote prévu ce lundi sur le renvoi devant la Cour suprême de quatre ex-ministres accusés de corruption, un vaste scandale qui avait fait trembler le gouvernement de Recep Erdogan.
Ce dernier, aujourd’hui président, a catégoriquement démenti les accusations portées contre ses proches, qu’il a attribué à un complot de ses ex-alliés de la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen.
A peine réunie à 14H00 GMT, la commission a suspendu ses travaux pour discuter d’objections présentées par les anciens ministres sur les accusations portées contre eux, et sur des questions de procédure.
Faute d’entente sur la marche à suivre au sein de la commission, celle-ci a décidé de reporter son vote sur le sort des quatre hommes au 5 janvier prochain, a annoncé le président de l’instance, Hakki Köylü.
Un vote ultime en séance plénière doit avoir lieu à la fin janvier pour confirmer celui de cette commission.
Un renvoi de ces ex-ministres devant la Cour suprême constituerait une première pour le régime du président Recep Tayyip Erdogan, accusé par ses adversaires d’autoritarisme.
Erdogan Bayraktar (Environnement et Urbanisme), Egemen Bagis (Affaires européennes), Zafer Çaglayan (Economie) et Muammer Güler (Intérieur), sont accusés de corruption active, fraude et trafic d’influence.
Ils ont démissionné du gouvernement en décembre 2013, après une vaste opération anticorruption visant des bureaucrates, politiques et hommes d’affaires proches du gouvernement dirigé à l’époque par M. Erdogan, aujourd’hui président.
Les revenus des quatre hommes, qui sont toujours députés du Parti gouvernemental de la justice et du développement (AKP) et jouissent d’une immunité, ont été passés au crible par la commission parlementaire, qui les a aussi entendus. Ils ont tous clamé leur innocence.
– Silence imposé aux médias –
La justice turque a imposé entre-temps un black-out médiatique controversé sur les travaux de l’instance au nom du respect de la présomption d’innocence.
Cette commission, composée en majorité de membres de l’AKP, avait été mise sur pied tardivement et sous forte pression de l’opposition parlementaire et de la société civile.
Le vaste scandale avait provoqué une crise politique et fait trembler le gouvernement dirigé pendant près de douze ans par M. Erdogan, élu président en août dernier.
Le pouvoir a réagi en ordonnant des purges sans précédent dans la police et la justice où les partisans de la confrérie de M. Gülen, exilé volontairement depuis 1999 aux Etats-Unis, étaient particulièrement actifs. Le gouvernement a accusé la confrérie de « machination » et d’avoir organisé un « Etat parallèle ».
M. Gülen, 73 ans, à la tête du mouvement Hizmet (Service en turc), qui a des intérêts dans les médias et la finance, a démenti toute implication.
La justice a rendu un non-lieu général à l’encontre d’une cinquantaine de suspects arrêtés dans le cadre du scandale, enterrant ainsi l’affaire au grand dam des critiques.
Mais « à l’approche des élections législatives, le pouvoir veut montrer qu’il lutte contre la corruption et pourrait ainsi faire juger les siens », a déclaré à l’AFP un parlementaire, sous couvert d’anonymat. Il a estimé que de nombreux députés au sein de l’AKP, qui détient la majorité absolue dans l’hémicycle, penchaient en faveur d’un renvoi des anciens ministres devant la justice.
Le Premier ministre Ahmet Davutoglu a affiché la fermeté du pouvoir, en déclarant à Ankara, que « quiconque s’en prend aux ressources, aux richesses nationales de notre pays, nous lui arracherons le bras même s’il s’agit de notre frère ».
Le prochain scrutin parlementaire est prévu pour juin 2015. L’AKP n’a perdu aucune élection depuis son arrivéé au pouvoir en novembre 2002.
M. Erdogan, qui a quitté ses fonctions à la tête de l’exécutif, reste l’homme fort du pays et ne cesse de répéter qu’il est déterminé à anéantir la confrérie Gülen.
Ce week-end il s’est ainsi félicité de la détention de journalistes la semaine dernière dans les milieux proches de M. Gülen vivant en Pennsylvanie, contre lequel la justice turque a aussi lancé vendredi un mandat d’arrêt pour conspiration.
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