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Courrier International, le 08/11/2017
par
THE ECONOMIST – LONDRES
Des étudiants de l’Université de Caire manifestent contre la décision de justice d‘abandonner les charges de complicité de meurtre visant l‘ex-président Hosni Moubarak, le 30 Novembre 2014 sur le campus de Giza, en banlieue du Caire, Égypte. / PHOTO REUTERS Staff
Peut-on croire à la conversion des islamistes à la démocratie ? À l’exception de la Tunisie, la réponse est négative dans la plupart des cas. Mais une étude approfondie montre que cet échec n’est pas seulement dû aux islamistes, écrit The Economist.
“Morts, à l’agonie, ou en prison.” C’est, résumé par un membre des Frères musulmans en Égypte, l’état général de ses camarades au sein de ce qui fut le principal mouvement islamiste du monde. Au lendemain du “printemps arabe” de 2011, la confrérie remportait les premières élections libres en Égypte ; début 2012, elle prenait les rênes de l’État. Mais elle n’a pas tardé à se faire chasser du pouvoir par l’armée, emmenée par Abdelfattah Al-Sissi et soutenue par des manifestations monstres. Il y a tout juste quatre ans, Sissi, aujourd’hui président, écrasait dans le sang le mouvement pro-islamiste. Aujourd’hui, ceux qui ne sont ni morts ni emprisonnés ont fui le pays ou vivent dans la clandestinité.
Pourtant, la Société des Frères musulmans, organisation transnationale dont émanent de nombreux autres partis islamiques de la région, n’en continue pas moins de faire peur aux autocraties arabes. Le cas du conflit autour du Qatar le montre bien. L’Égypte, l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis et Bahreïn ont rompu leurs relations diplomatiques et instauré un embargo avec le minuscule pays gazier, sommé de cesser de soutenir la confrérie et de fermer la chaîne Al-Jazira, proche des Frères musulmans.
La fondation des Frères musulmans
Que la confrérie ait inspiré des violences et que ses membres aient commis des attentats, nul ne peut le nier. Quant à savoir si le mouvement est par nature violent, c’est plus difficile à dire. Hassan Al-Banna, qui fonda la Société des Frères musulmans à Ismaïlia, dans le nord-est de l’Égypte, en 1928, appelait à des réformes progressives [il déclara aussi : “le djihad est notre voie”]. Sayyid Qutb, figure éminente de la confrérie dans les années 1950-1960, prônait l’intervention armée contre les dirigeants infidèles. [Pour Qutb aussi, le djihad ne saurait se limiter à son aspect défensif, et devrait être utilisé dans le territoire de l’islam autant qu’en dehors de celui-ci. Qutb érige le djihad en pilier de l’islam.] C’est de ce débat qu’est issu l’islamisme moderne et ses variantes très diverses. Parmi ses déclinaisons et hybridations actuelles figurent des organisations aussi différentes qu’Ennahda, parti politique tunisien non violent, et Daech, groupe djihadiste violent pour qui les Frères musulmans sont des apostats. Au sein de la confrérie elle-même, en Égypte, les tenants d’une stratégie de confrontation, parmi lesquels des partisans de la violence, s’opposent aux défenseurs d’une démarche plus conciliatrice.
Pour l’Arabie Saoudite et les autres pays menant la fronde contre le Qatar, l’ensemble de la mouvance islamiste est infréquentable – ce qui n’empêche pas certains, pour des raisons tactiques, de faire cause commune avec des islamistes en Palestine, au Yémen ou en Syrie. Pour d’autres, en particulier pour certains pays occidentaux qui se refusent à classer la confrérie parmi les organisations terroristes, des distinguos méritent d’être faits. Et ça n’est pas facile. Une fois élus, des islamistes qui se montraient jusque-là modérés et démocrates se révèlent souvent n’être ni l’un ni l’autre. Pour autant, il y a des islamistes qui participent à la vie politique, y compris au sein de gouvernements, et qui le font sans intransigeance.
L’islamisme est loin d’être le seul mouvement aspirant à injecter plus de religion dans la vie publique. En Inde, le BJP, au pouvoir, prône un nationalisme ouvertement hindou. Israël possède toute une série de partis politiques militant pour une judéité plus marquée des institutions. L’islam possède cependant une singularité unique. Alors que Moïse était un chef sans État et Jésus un dissident qui finit exécuté par un autre État, Mahomet était un chef politique qui fonda une entité sociale [l’oumma], et les textes saints de l’islam en attestent. “Il y a dans le Coran des injonctions claires et directes, qui vont de l’application des hudud [sanctions fixées par le droit musulman] aux règles de transmission du patrimoine”, écrit Shadi Hamid, de la Brookings Institution, un think tank américain.
Schisme entre sunnites et chiites
Cependant, si le Coran a des préconisations précises sur diverses questions comme l’héritage, il reste plus flou sur les règles de gouvernement. Une sourate invite Mahomet à consulter les membres de sa communauté, une autre lui donne un pouvoir absolu sur eux. Et dès la mort de Mahomet sont apparues des dissensions. C’est d’ailleurs parce que ses plus proches adeptes ne parvenaient pas à se mettre d’accord pour déterminer si la fonction de calife (le successeur de Mahomet) devait être élective ou héréditaire qu’a eu lieu le grand schisme entre sunnites et chiites.
Le régime du califat lui-même n’est pas imposé par le Coran. Mais “la pensée musulmane traditionnelle [y] voyait un aspect inhérent à l’islam, ce qui allait involontairement politiser la religion pour les siècles à venir”, écrit [le journaliste turc] Mustafa Akyol. De fait, ce califat héréditaire, réunissant sous une seule figure le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel, fut le modèle de l’entité politique musulmane durant plus d’un millénaire.
L’abolition du califat par la République turque
C’est la fin de l’Empire ottoman et l’abolition du califat par la République turque [en 1924] qui ont façonné l’islamisme moderne. Humiliés par le colonialisme et l’échec du socialisme et du nationalisme, dont des autocrates tentèrent, à des fins personnelles, de faire la synthèse avec l’islam, les musulmans se mirent à rêver d’une idéologie alternative qui tienne la route dans un monde d’États-nations et de suffrage universel. Et les Frères musulmans en avaient une à leur proposer.
La démocratie ne faisait pas partie des préceptes de Mahomet, c’est pourquoi Hassan Al-Banna la réprouvait, la considérant comme une importation de l’étranger. Mais pour lui, le chemin vers un État islamique devait se faire par étapes, chacune nécessitant une tactique distincte. Les islamistes pouvaient donc dans un premier temps mettre de côté leur objectif suprême, et même participer à des élections, si cela pouvait servir leur ambition à long terme. Certains partisans d’Al-Banna considéraient même que la démocratie pouvait faire partie du processus d’islamisation à toutes ses étapes. Pour leurs détracteurs cependant, la plupart des islamistes étaient, et restent, antidémocrates par nature.
De l’illusion de l’islam nouveau aux purges d’Erdogan
Cette grille de lecture s’applique assez bien à l’AKP et à son chef à poigne, le président turc Recep Tayyip Erdogan. Lorsqu’il fonda le parti en 2001, Erdogan semblait incarner un islamisme nouveau, qualifié de “light” par certains observateurs et attaché aux libertés et à l’économie de marché. Après sa première victoire aux législatives, en 2002, l’AKP mit en œuvre des réformes démocratiques, raccourcit la bride de l’armée turque et œuvra pour une meilleure reconnaissance officielle des droits de l’homme. La Turquie semblait ainsi façonner pour d’autres partis islamistes un nouveau modèle encourageant.
Mais Erdogan s’est mis progressivement à accaparer de plus en plus de pouvoir. Il a placé les médias publics sous sa coupe et entrepris de débarrasser l’État, l’armée et la justice des esprits critiques. Et en juillet 2016 un coup d’État manqué lui a fourni le prétexte à de grandes purges. Des dizaines de milliers d’ennemis, réels ou imaginaires, ont été arrêtées, parmi lesquels des journalistes. Des organisations de la société civile ont été dissoutes, des fonctionnaires limogés, des sites Internet bloqués. En avril, un référendum constitutionnel a encore accru le pouvoir du président.
Pour tous ceux convaincus qu’il n’existe pas d’islamisme modéré, la Turquie est un cas d’école. De même que l’Égypte. Mohamed Morsi, grande figure des Frères musulmans devenu président [en 2012], s’est montré d’emblée clivant et borné. Il ne gouvernait pas depuis un an qu’il avait décrété ne pas être tenu par les contraintes de la justice. Il fit adopter une Constitution décriée par le monde politique laïc et plaça une majorité d’islamistes au sein de son gouvernement. Au moment du coup d’État contre lui [en 2013], une grande partie de l’opinion était déjà du côté de l’armée.
L’armée laïque, véritable “État dans l’État” en Turquie et en Egypte
Rétrospectivement, estiment certains, ces deux dénouements (un courant réactionnaire victorieux en Turquie, vaincu en Égypte) étaient prévisibles, voire inévitables. Il faut cependant revenir sur le contexte dans lequel chacun s’inscrit. Avant l’entrée en scène de l’AKP en Turquie, quatre partis islamistes avaient déjà été dissous, soit à la suite d’un coup d’État, soit par décision de justice. Et les menaces n’ont pas disparu une fois le parti d’Erdogan au pouvoir. Les milieux laïques au sein de l’armée, un véritable “État dans l’État” tentèrent en 2007 d’invalider l’élection à la présidentielle du candidat de l’AKP. Un an plus tard, la Cour constitutionnelle ouvrait contre l’AKP une procédure pour atteinte à la laïcité qui faillit aboutir à son interdiction.
En Égypte aussi, la société des Frères musulmans dut faire face à une opposition, venue là aussi d’un État dans l’État issu de l’armée, de la justice et de la fonction publique. La police refusa d’assurer ses patrouilles, laissant la criminalité s’envoler. Des employés des compagnies de gaz et d’électricité provoquèrent des coupures artificielles. Des magistrats invalidèrent les résultats d’une élection.
“Les partis islamistes s’adaptent à leur environnement politique”
Tous ces obstacles n’excusent en rien l’autoritarisme dont ont fait preuve Morsi et Erdogan. Mais peut-être l’expliquent-ils plus qu’une nature fondamentalement réactionnaire de leur idéologie. “Les partis islamistes s’adaptent généralement à leur environnement politique”, appuie Marc Lynch, de l’université George-Washington. La peur de voir les laïques tenter de saper leur pouvoir a convaincu les islamistes élus qu’il leur fallait accaparer le plus de pouvoir possible – et l’absence de tradition démocratique a fait le reste. Le problème de l’AKP n’est pas qu’il soit trop islamiste, juge Mustafa Akyol, “c’est surtout qu’il est excessivement turc, en réalité”.
Ailleurs dans le monde, des partis islamistes restent dans le jeu électoral. Après des années de répression, les déclinaisons des Frères musulmans en Jordanie et au Koweït ont enregistré des scores relativement bons aux législatives de l’année dernière. Autre émanation de la confrérie, le Parti de la justice et du développement a remporté au Maroc les deux dernières élections législatives et dirige l’actuel gouvernement. Hors de l’orbite des Frères musulmans, d’autres partis islamistes sont actifs en Indonésie, en Malaisie et au Pakistan. Nul ne peut affirmer que ces partis n’ont pas opté pour la stratégie du long terme que prônait Al-Banna. Mais on peut au moins admettre que l’autoritarisme n’a rien d’inéluctable dès lors que le contexte ne l’encourage pas. Partout, ou presque, où des islamistes jouent le jeu politique, des freins existent pour limiter la concentration du pouvoir. Au Maroc, en Jordanie comme au Koweït, le vrai pouvoir est entre les mains de monarques.
Cela dit, les islamistes n’ont pas besoin de remporter des élections nationales pour que progressent leurs vues réactionnaires. En Indonésie, une démocratie laïque, aucun parti ouvertement religieux n’a jamais obtenu plus de 8 % des voix aux élections législatives nationales, bien que le pays soit majoritairement musulman. Mais les islamistes élus au niveau local ont adopté plus de 400 ordonnances conformes à la charia depuis que les régions ont obtenu davantage d’autonomie, en 1999. Dans la province d’Aceh, l’alcool est interdit, la tenue des femmes est encadrée par la loi, et l’adultère et l’homosexualité sont punis de coups de fouet.
Mais la manifestation la plus troublante du pouvoir de cette minorité islamiste remonte au mois d’avril dernier, quand un candidat populaire, le chrétien Basuki Tjahaja Purnama (plus connu sous le nom d’Ahok) n’a pas été reconduit au poste de gouverneur. Les sympathisants islamistes de son adversaire, Anies Baswedan, ont affirmé aux électeurs musulmans qu’il était haram (interdit par l’islam) de voter pour un chrétien. Quand Ahok a tenté de réfuter cet argument en citant le Coran, une vidéo truquée est sortie, donnant l’impression qu’il dénigrait le livre saint. Il a été mis en examen pour blasphème et a perdu l’élection – avant d’être condamné à de la prison. Selon une enquête menée en 2015 par le Centre d’études de l’islam et de la société, un groupe de réflexion de Jakarta, si les ordonnances tirées de la charia ont proliféré, c’est le plus souvent parce que des élus locaux ont accédé aux revendications de groupes musulmans conservateurs en échange de leurs voix.
L’Islam et le droit
La législation islamique jouit d’un soutien important dans les pays musulmans, tous partis confondus. En Égypte, les enquêtes montrent qu’une majorité de la population est favorable à des lois inspirées de la charia, à l’instauration de peines tirées du Coran et à l’octroi de pouvoirs législatifs aux religieux. En Turquie en revanche, l’AKP ne s’est pas distingué en ce sens. Le parti a intensifié la construction de mosquées et l’ouverture d’écoles religieuses, a encadré la vente d’alcools et levé les interdictions sur le hidjab. Mais il n’a pas fait interdire l’alcool ni imposé de lois vestimentaires. Plus généralement, le parti semble plus soucieux de mettre l’islam au service de la politique que l’inverse.
Les progressistes peuvent s’inquiéter de voir que les islamistes, même quand ils sont minoritaires, sont capables d’entraîner des durcissements juridiques. Mais c’est au fond un risque avec lequel vivent toutes les démocraties, et contre lequel elles peuvent lutter lorsqu’elles sont fortes. D’où la conviction qu’ont certains analystes que le maintien d’un système électoral est au fond une priorité à laquelle le progressisme doit parfois être temporairement sacrifié : une démocratie réactionnaire peut devenir une démocratie progressiste, plaident-ils. Dans des pays qui ont connu l’autoritarisme, il faut laisser le temps à la démocratie de s’enraciner et de se consolider par la pratique.
En Tunisie, la modération d’Ennahda
Pour y croire, il faut aussi avoir la conviction que les islamistes, une fois au pouvoir, continueront d’organiser des élections. En la matière, l’exemple type est la Tunisie. De nombreux membres d’Ennahda rêvaient d’instaurer un État islamique et la charia dans le pays. Mais en fin de compte le mouvement a globalement fait preuve de modération et d’un rare esprit de compromis.
Ennahda a souffert des décennies durant sous la dictature laïque de Ben Ali, qui avait interdit le mouvement. Après la chute de Ben Ali en 2011, le parti a remporté un grand nombre de sièges au Parlement lors des premières élections libres en Tunisie. Mais son passage au gouvernement n’a pas été probant et lui a valu la désaffection des Tunisiens, qui pour beaucoup n’étaient déjà pas vraiment convaincus par les islamistes. L’assassinat de deux figures politiques de gauche en 2013 par des musulmans fondamentalistes n’a pas arrangé les choses.
L’opposition au gouvernement Ennahda a fini par se solder par des manifestationsqui menaçaient de défaire les fragiles acquis démocratiques du pays. Mais au lieu de camper sur ses positions, comme les Frères musulmans en Égypte, Ennahda a choisi de céder du terrain. Lors des débats sur la nouvelle Constitution, le parti a accepté des recommandations plus progressistes, comme la garantie de la liberté de culte. Après avoir cédé le pouvoir à un gouvernement technocrate en janvier 2014, Ennahda a perdu les élections suivantes au profit de Nidaa Tounes, un parti laïc délibérément créé pour lui couper l’herbe sous le pied. Nidaa Tounes a depuis connu une scission, mais Ennahda n’a pas essayé de tirer avantage de sa position de parti dominant au Parlement. “En cette période de transition, ce dont nous avons besoin, c’est du consensus le plus large”, a déclaré Ghannouchi.
Ghannouchi présente désormais Ennahda non plus comme un parti islamiste mais comme une formation de “musulmans démocrates”, sur le modèle des chrétiens-démocrates en Europe. Le mouvement a dissocié le parti politique de son bras religieux, désormais uniquement chargé de la dawah (le prosélytisme et le prêche). Ses hommes politiques ne peuvent pas prononcer de discours dans les mosquées, et les religieux ne peuvent être à la tête du parti. Ennahda continue de s’inspirer des principes de l’islam, explique Ghannouchi, mais “la présence de la religion [dans la société] n’est pas quelque chose qui se décide ou se fixe au niveau de l’État”. Il faut que ce soit un “phénomène qui parte du peuple”.
Les partisans de la laïcité et les progressistes espèrent depuis longtemps voir les islamistes modérés suivre cette voie. En d’autres termes, ils espèrent que l’islamisme, qui est historiquement un mouvement d’opposition, se fasse moins islamiste une fois confronté aux réalités du pouvoir. Ce qui soulève d’autres questions. Comme l’écrit Shadi Hamid, de la Brookings Institution :
Partir du principe que les partis islamistes devraient cesser de l’être une fois élus est contraire à l’essence même de la démocratie, à l’idée que les gouvernements doivent écouter, ou à tout le moins entendre, les préférences de la population.”
Au sein d’Ennahda, les plus conservateurs n’apprécient guère le tournant pris par leur mouvement. D’autres doutent de la bonne foi des islamistes, dont la modération serait selon eux surtout stratégique, et due seulement à la peur de la répression ou d’une révolte. Comme son échec en Égypte, l’évolution plus heureuse de l’islamisme en Tunisie doit beaucoup au contexte local. Contrairement à l’Égypte et à la Turquie, la Tunisie possède une armée qui n’est ni puissante ni politisée. Et alors que dans l’Égypte d’avant 2011 [le “printemps égyptien”] la répression d’État ne faisait que radicaliser un peu plus les Frères musulmans à chaque fois, en Tunisie elle a conduit les membres d’Ennahda, emprisonnés aux côtés d’autres membres de l’opposition, à adopter des points de vue moins intransigeants. Selon les pays, le contexte et les écueils particuliers au contexte local façonnent autant d’islamismes différents.
retrouvez l’article dans ce numéro du C.I.
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