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La Croix avec AFP, le 09/05/2019
Il promet une « révolution » dans les urnes: après l’annulation controversée du premier scrutin, le maire déchu d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, voit les prochaines élections municipales comme un « combat pour la démocratie ».
« Ce que nous sommes en train de faire, c’est mener un combat pour la démocratie, une mobilisation pour la démocratie. Cela se traduira par une révolution », a assuré M. Imamoglu à l’AFP dans son QG à Beylikdüzü, un district périphérique d’Istanbul.
Après un déluge de recours déposés par le parti du président Recep Tayyip Erdogan dénonçant des « irrégularités massives », les autorités électorales turques ont annulé lundi le scrutin municipal du 31 mars remporté à Istanbul par M. Imamoglu.
L’annulation de l’élection a été qualifiée par l’opposition de « putsch contre les urnes » et a suscité la préoccupation de plusieurs pays occidentaux.
Cette décision a « porté un coup terrible à la démocratie en Turquie », déplore M. Imamoglu, estimant que les membres du Haut-comité électoral (YSK) ayant voté pour l’annulation du scrutin resteraient « dans l’histoire comme une tache ».
L’YSK a défendu son choix en affirmant que des scrutateurs dans certains bureaux n’étaient pas des fonctionnaires, contrairement à ce que prévoit la loi. Les Stambouliotes voteront une nouvelle fois pour élire leur maire le 23 juin.
La défaite du parti présidentiel AKP à Istanbul, une ville contrôlée par les islamo-conservateurs depuis 25 ans, a porté un rude coup au président Erdogan qui avait acquis la réputation d’être invincible dans les urnes.
L’opposition et des analystes estiment qu’en faisant annuler le scrutin du 31 mars, M. Erdogan risque de saper la confiance des Turcs dans les élections.
Bien plus que le choix d’un édile, « l’élection municipale d’Istanbul est devenue un combat pour la démocratie », avance M. Imamoglu.
– « Ondes positives » –
Quasiment inconnu avant cette élection, cet homme de 48 ans s’est imposé au cours de la campagne en jouant la carte de la simplicité et en opposant à la rhétorique clivante du président Erdogan un discours rassembleur.
Une recette que M. Imamoglu compte bien répéter : « Je ne vais pas changer de personnalité », dit-il, les yeux rieurs derrière ses lunettes carrées. « Je vais continuer de donner de l’espoir aux gens en envoyant des ondes positives et en témoignant du même respect ».
M. Imamoglu avait été élu le 31 mars sous la bannière de deux partis d’opposition, le CHP (socialdémocrate) et l’Iyi (droite), avec le soutien tacite des prokurdes du HDP.
Le 23 juin, il affrontera une nouvelle fois l’ex-Premier ministre Binali Yildirim, candidat de l’AKP qu’il avait battu avec moins de 13.000 voix d’avance. Soit une goutte d’eau à l’échelle d’une ville de plus de 15 millions d’habitants.
Alors que des opposants redoutent des fraudes lors du nouveau scrutin, M. Imamoglu affirme que son camp « sera très attentif » et « livrera un combat acharné » pour que l’élection soit « juste ».
Dans les heures qui ont suivi l’annulation de son élection, M. Imamoglu s’était efforcé de maintenir le moral des troupes en appelant ses partisans à « ne pas désespérer ». Il a lancé une campagne sur les réseaux sociaux avec le mot-dièse « Tout ira bien », devenu viral ces derniers jours.
« C’est la preuve que la Turquie a foi en la démocratie. Ce peuple est jaloux de ses libertés », souligne-til. Des observateurs estiment que l’indignation ayant suivi l’annulation du premier vote pourrait se traduire en manifestations sur le modèle d’un grand mouvement antigouvernemental en 2013.
« Ce n’est pas comparable », pense toutefois M. Imamoglu. « Il y a bien sûr une demande pour le respect des droits, mais (manifester) ce n’est pas notre méthode (…). Nous allons nous battre pour la démocratie dans les urnes ».
Quelle que soit l’issue du prochain scrutin, M. Imamoglu a d’ores et déjà été propulsé au rang de figure de proue de l’opposition. Au point que certains le verraient bien affronter M. Erdogan lors de la prochaine élection présidentielle, prévue en 2023.
« Pour le moment, notre objectif, c’est la mairie d’Istanbul », recadre toutefois M. Imamoglu. « Nous voulons diriger Istanbul, récupérer ce que nous avons déjà remporté ».
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