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Médiapart, le 01/01/2021
Par NICOLAS CHEVIRON
Prenant le contrepied de l’« ottomania » qui s’est emparée de l’industrie cinématographique turque, l’équipe du réalisateur Hakan Alak achève le tournage d’un film qui rend hommage à la révolte initiée par le penseur soufi.
Istanbul (Turquie).– Voilà une décennie que l’industrie turque des films et des séries télé semble décidée à rendre hommage à tout ce que l’histoire ottomane a produit de têtes couronnées. D’Ertugrul Gazi, grand ancêtre de la dynastie ottomane, qui combattit les Byzantins au XIIIe siècle, jusqu’à son lointain descendant le sultan Abdülhamid II, qui régna d’une main de fer sur un empire agonisant à l’aube du XXe, en passant par Mehmet II, conquérant de Constantinople, ou encore Soliman le Magnifique, tous font l’objet de fictions à la chaîne.
La nostalgie de l’actuel chef de l’État islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan pour la grandeur et les fastes de l’empire, et la volonté de son gouvernement d’utiliser les productions culturelles comme un instrument de soft power ne sont certes pas étrangères à cet engouement.
Elles sont en revanche aux antipodes des motivations du réalisateur Hakan Alak et de son équipe, qui achèvent en ce moment le tournage de La Vérité (Hakikat), premier long-métrage consacré à l’épopée tragique du savant soufi Sheikh Bedreddin. Mis à mort en 1420 à Serrès, dans le nord de l’actuelle Grèce, après avoir semé les graines de la sédition dans tout l’ouest de l’Empire ottoman, il est devenu au XXe siècle une figure tutélaire de la gauche turque, grâce à la plume du poète communiste Nâzim Hikmet.
Dès la bande-annonce, le ton du film est donné. « Pendant que les uns amassaient les richesses, les autres manquaient de pain. Pourtant, les produits de la terre appartiennent à nous tous. Ils sont le bien commun […]. Le palais, le sultanat, la cavalerie sont tous, absolument tous, des produits de la tyrannie », affirme une voix-off mélangeant les vers de Nâzim Hikmet et les paroles originales des révoltés. On devine que le propos s’adresse autant au présent qu’au passé.
Şeyh Bedreddin Hakikat I Official Teaser (w Eng, Fr, Esp, Gr Subtitle) © Tristana
Né en 1359 près de l’actuelle ville turque d’Edirne, en Thrace orientale, Sheikh Bedreddin est un érudit, un théologien qui a étudié la pensée mystique soufie au Caire et à Ardabil (Iran). Quand débute la guerre de succession entre les fils du sultan Bayezid Ier, en 1403, il occupe le poste prestigieux de kazasker – sorte de ministre de la justice – auprès de l’un d’eux, Musa.
Après la défaite de son prince, vaincu par le futur sultan Mehmet Ier en 1413, le savant est exilé à Iznik, dans le nord-ouest de la Turquie. Mais il parvient à s’enfuir et trouve refuge dans les forêts profondes de la Dobroudja (nord-est de la Bulgarie), où il s’entoure de nombreux disciples. Entretemps, ses idées ont essaimé dans l’empire et des révoltes se revendiquant de sa pensée éclatent à Karaburun et à Manisa, sur la façade égéenne de l’Anatolie.
Abolition de la propriété privée et dépassement des différences religieuses sont les deux thèmes principaux qui ont marqué les esprits des exégètes de Sheikh Bedreddin, à commencer par le premier d’entre eux, Nâzim Hikmet. Celui-ci découvre la pensée du Sheikh en 1933-34 dans sa prison de Bursa, où il est enfermé pour propagande communiste.
« Nâzim Hikmet a vu que, dans cette révolte de Karaburun, il y avait une utopie communiste, affirme à Mediapart l’écrivain Nedim Gürsel, auteur en 1978 d’un essai sur l’épopée de Sheikh Bedreddin. C’est-à -dire un projet de société égalitaire, presque sans classes, une forme d’internationalisme et une tentative d’aller au-delà des religions. Nous sommes au XIVe siècle et il y a des guerres de religion partout, mais là , contre l’État central, les pauvres – les pêcheurs grecs, les paysans musulmans, les juifs – luttent ensemble. »
De cette découverte, le poète tire une épopée en vers et en prose, dans laquelle il en profite pour développer des thèmes plus contemporains. « Nous sommes en 1933-34, la collectivisation bat son plein en Union soviétique, et en bon communiste, Nâzim Hikmet transpose cette idée à la révolte de Karaburun, indique Nedim Gürsel. Beaucoup plus tard, il avouera avoir inconsciemment donné les traits de Lénine au Sheikh Bedreddin. »
Peu importe, son œuvre offrira l’immortalité à la figure du théologien hérétique et fera connaître à la gauche turque une généalogie de ses combats jusque-là largement occultée par l’histoire officielle. Car une fois les révoltes – difficilement – matées dans le sang – on parle de milliers de personnes massacrées –, les chroniqueurs s’efforceront de passer sous silence ou de minorer la dimension subversive du parcours de Sheikh Bedreddin.
« Dans nos cours sur l’époque ottomane, on ne nous parle que des sultans, des émirs et des États qu’ils ont fondés, jamais de l’histoire des opprimés. Car ce sont les vainqueurs, les puissants qui écrivent l’histoire, et la matière s’offre à toutes les distorsions », résume Bülent Emrah Parlak, qui interprète dans La Vérité le rôle de Börklüce Mustafa, chef de la révolte de Karaburun.
Alors que les historiens officiels désignent le leader séditieux comme un fanatique dangereusement acoquiné avec le clergé grec orthodoxe, l’acteur défend son personnage, qui finira supplicié entre les mains des hommes de Mehmet Ier. « Börklüce Mustafa est un soldat ottoman, un bon soldat. Mais, dans une quête de vérité, il va rejoindre un des plus grands intellectuels de son temps. Il va prêter serment de donner leur part aux opprimés, de défendre l’égalité entre tous. Il pense aussi que la mosquée, l’église ou la synagogue sont toutes des maisons de Dieu, explique le comédien. C’est une fierté pour nous qu’un tel mouvement ait vu le jour sur notre sol. »
Il a fallu près de trois ans à l’équipe de Hakan Alak pour parvenir à réaliser La Vérité. « En Turquie, toute personne animée par un idéal de gauche et qui est un peu active dans le secteur artistique a rêvé un jour de faire un film sur Sheikh Bedreddin. Mais personne n’y était encore parvenu, parce que réaliser un film d’époque, ça coûte cher, déclare le réalisateur de 46 ans. Et l’argent est d’autant plus difficile à trouver quand on vient d’un milieu d’opposition et qu’on veut raconter l’histoire d’un homme qui s’est révolté contre le système. »
« Aujourd’hui, la plupart des films historiques en Turquie décrivent le passé au bénéfice du système en place, en lui donnant une dimension héroïque, et ils reçoivent des soutiens pour ça. Nous, on a fait tout le contraire, poursuit Hakan Alak. À l’arrivée, on a fabriqué notre film dans l’esprit même de Sheikh Bedreddin et de Börklüce Mustafa, en réunissant les soutiens de centaines de partenaires unis dans une aventure commune. »
Le réalisateur, également coscénariste du film, se moque de cette industrie cinématographique aux ordres, contrainte de fabriquer un passé en toc par un pouvoir politique « qui cherche à imposer ses codes culturels » et à détourner l’attention des gens vers « un monde passé imaginaire quand le présent flanche ».
« On nous prend tellement de choses en ce moment, notre prospérité, nos rêves, notre objectif de devenir une société meilleure. Et en plus, on nous présente en modèle le sultan [Abdülhamid II] qui a suspendu les activités du Parlement pendant les 35 ans de son règne, s’indigne l’artiste. Comment pourrais-je admirer un homme pareil ? »
Pour Nedim Gürsel, auteur du Roman du Conquérant (Seuil) et, plus récemment, d’un recueil de chroniques intitulé Turquie libre, j’écris ton nom (Bleu autour), la réappropriation du passé ottoman, après la rupture qu’a constituée l’instauration de la République turque, en 1923, est une bonne chose. « Mais Erdogan a essayé de créer une sorte d’“ottomania’’. Cela a commencé, quand il était maire d’Istanbul (1994-98), par la célébration de la conquête de la ville, estime l’écrivain. Et cette instrumentalisation, grotesque à mes yeux, du passé ottoman pour des raisons politiques et idéologiques continue et empire depuis 20 ans. »
Hakan Alak se défend pour sa part d’avoir commis une œuvre de propagande à rebours. « Je ne place pas dans la bouche de mes personnages des paroles et des idées du présent, assure-t-il. Ce sont les mots qui ont réellement été prononcés il y a 600 ans par nos héros, qui entrent avec force en résonance avec notre présent. »
« Comme toutes les révoltes du Moyen Âge, celle de Sheikh Bedreddin a un motif initial religieux, parce que toute la vie à l’époque est régie par la religion. Mais en réalité, le fond de l’histoire, ce sont des problèmes d’impôts, de pauvreté, d’appauvrissement, des problèmes auxquels nous sommes toujours confrontés aujourd’hui en Turquie », commente-t-il.
Initialement prévue pour mars, la diffusion du film a été reportée à l’automne, en raison de la pandémie de coronavirus.
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