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La Croix avec AFP, le 27/02/2019
« Recep Tayyip Erdogan, candidat pour le quartier de Dumplupinar ». Les affiches placardées dans cette ville du nord-ouest de la Turquie prêteraient à confusion si la photo collée sous le slogan était celle du président turc et non celle d’un jeune homme au visage rond.
Agé de 20 ans, Recep Tayyip Erdogan ne partage pas seulement avec l’actuel chef de l’Etat le même nom, mais aussi le virus de la politique. Candidat aux élections locales qui auront lieu le 31 mars, il rêve de vivre une épopée politique semblable à celle de son homonyme.
« Etre né avec ce nom, c’est comme si mon destin était écrit », sourit Recep Tayyip, visage rond et collier de barbe. A 20 ans, il est candidat pour la première fois dans la ville de Gölcük, dans la province de Kocaeli.
Pour l’instant, il ne brigue pas la présidence de la République, mais un modeste mandat de « muhtar », une sorte de maire de quartier élu tous les cinq ans.
Si son père l’a prénommé ainsi, c’est parce qu’il admirait l’actuel président turc qui, à la naissance de Recep Tayyip, était maire d’Istanbul (1994-1998), un poste qui lui a servi de tremplin pour ensuite s’imposer sur la scène politique nationale.
« C’est un dirigeant que je prends pour modèle », explique Recep Tayyip qui dit admirer « l’attitude, la façon de parler au monde et de se préoccuper pour les gens » du chef de l’Etat qu’il n’a jamais rencontré.
S’appeler Recep Tayyip Erdogan n’a pas toujours été facile, explique le jeune homme, ajoutant que son nom a donné lieu à plusieurs scènes cocasses.
« Souvent, les gens croient que c’est une blague et ceux qui ne me croient pas demandent à voir ma carte d’identité », sourit-il.
– « Imposteur » –
Son nom lui a donné de la visibilité sur les réseaux sociaux, avec des partisans du président turc lui envoyant des encouragements. Mais il indique avoir également reçu de nombreuses critiques.
« Certains disent qu’il y a un imposteur du « Reis » (« chef », en turc) sur les réseaux sociaux », dit-il.
Reste que la fonction de muhtar a une importance symbolique pour le président Erdogan.
Après un bref emprisonnement en 1998 pour avoir lu un poème religieux, M. Erdogan était donné pour mort politiquement. Certains journaux affirmaient qu’il ne pourrait « même plus être muhtar » s’il le voulait.
Aujourd’hui, le chef de l’Etat turc invite régulièrement des muhtars au palais présidentiel auxquels il s’adresse lors de discours qui servent à faire passer des messages politiques ou à galvaniser sa base.
En Turquie, les muhtars ne sont affiliés à aucun parti, même s’ils font la plupart du temps peu de mystère sur leurs préférences.
Recep Tayyip, qui se présente face à deux adversaires, est convaincu que son nom lui donnera un coup de pouce auprès des électeurs.
« Notre président est très populaire, il a été élu avec 52,6% des voix. Bien entendu, j’estime qu’il y a plus de chances pour que ses supporters votent pour moi », déclare-t-il.
– Ambition –
Costume noir trois pièces et grosse montre en évidence, Recep Tayyip fait le tour des commerçants pour distribuer des tracts en attendant les élections.
« Je ne peux pas dire que je suis un grand fan du vrai titulaire de ton nom, mais tu m’as l’air d’un bon gars. Je voterai peut-être pour toi », lâche un vendeur de pommes de terre dans le marché couvert de Gölcük.
Pour l’épauler à l’aube d’une potentielle carrière politique riche, Recep Tayyip peut en tout cas compter sur son frère jumeau Talha. Son aîné de huit secondes le conseille et s’occupe de sa présence sur les réseaux sociaux.
« Je l’ai toujours soutenu et il n’y a absolument aucune jalousie entre nous », indique Talha. « Nous sommes toujours ensemble ».
L’aventure de Recep Tayyip n’en est qu’à ses débuts et le jeune homme ne cache pas qu’il vise haut, même s’il garde la tête froide.
« Je suis encore jeune, j’ai besoin de me développer », dit-il. « Mais pourquoi ne pourrais-je pas devenir président pour servir mon pays, après avoir progressé, atteint l’âge nécessaire et être devenu digne de cette fonction ? »
afp
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