Huit jours après la tentative de putsch en Turquie, un rassemblement de soutien à la démocratie doit se tenir dimanche 24 juillet sur l’emblématique place Taksim à Istanbul, celle de tous les combats. L’appel a été lancé par le Parti républicain du peuple (CHP), la principale formation d’opposition. Il a été suivi par le Parti de lajustice et du développement (AKP), le parti conservateur du président Recep Tayyip Erdogan, une première.
Ce rassemblement intervient alors que l’Europe s’inquiète publiquement des purges massives qui ont suivi le coup d’Etat manqué, qui a fait 270 morts et déclenché des purges massives dans l’armée, la justice, l’enseignement et lesmédias par un pouvoir turc totalement pris par surprise.
Afflux
La gratuité des transports en commun à Istanbul, instaurée après le putsch raté, a été prolongée par la mairie pour les 15 millions d’habitants jusqu’à dimanche minuit en prévision d’un afflux au rassemblement prévu à partir de 18 heures (17 heures à Paris).
En début d’après-midi, se dressaient sur la place des tentes et des bannières« Non au coup d’Etat ». L’immense esplanade de Taksim est traditionnellement le théâtre des grandes luttes pour la démocratie. Ironiquement, elle a été le siège en 2013 de semaines de violentes manifestations qui avaient ébranlé le pouvoir du président Erdogan.
Des déclarations du CHP sur les drapeaux laissaient entrevoir des discordances dans ce qui était annoncé comme un grand rassemblement d’union en faveur de la démocratie. Le vice-président du CHP, Tekin Bingöl, a appelé les « compatriotes »à se présenter place Taksim avec « un drapeau turc, des portraits d’Atatürk à la main et leur amour de la Turquie dans leur cœur ».
Les Occidentaux inquiets
La cheffe de la diplomatie de l’Union européenne (UE), Federica Mogherini, et le commissaire européen à l’élargissement, Johannes Hahn, se sont exprimés jeudi soir pour rappeler que l’Union européenne appelait les autorités turques « à respecter, en toutes circonstances, l’Etat de droit, les droits de l’homme et les libertés fondamentales, y compris le droit de chacun à un procès équitable ».
Le président turc a répondu aux critiques, lors d’un entretien samedi avec la chaîne française France 24. Ce que disent les responsables européens « ne m’intéresse pas et je ne les écoute pas », a-t-il déclaré.
« Vis-à -vis de la Turquie, ils ont des préjugés et ils vont continuer à agir avec ces préjugés », a précisé le chef de l’Etat. « Cela fait cinquante-trois ans que l’Europe nous fait attendre à la porte », a-t-il ajouté, selon ses propos traduits en français par la chaîne.
« La souveraineté appartient au peuple »
L’Union européenne a prévenu qu’un rétablissement de la peine de mort, évoqué par Ankara juste après le putsch, mettrait un terme à ses espoirs d’accession au bloc européen. « Si mon peuple, mon pays, demande sans arrêt la peine de mort, si les représentants de mon peuple à l’assemblée disent oui, désolé, je dois respecter cette demande, a répondu M. Erdogan. Dans les démocraties, la souveraineté appartient au peuple. »
Peu après la diffusion de l’interview, le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, a reproché à Ankara de « mettre en prison l’avenir » de la Turquie.
Mais le président turc n’est pas le seul à justifier sa répression. « Venez ici ! Venez voir à quel point c’est grave ! », a lancé le ministre des affaires européennes Omer Celik. A ses yeux, Fethullah Gülen, l’intellectuel turc exilé aux Etats-Unis et accusé par le pouvoir d’être derrière le coup d’état, est « plus dangereux qu’Oussama Ben Laden » et son mouvement « plus sauvage que Daech ».
Avant la manifestation de dimanche, ce sont les partisans du président qui sont redescendus dans les rues samedi soir crier leur haine de Fethullah Gülen.
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