Alors que les sondages donnent le “oui” et le “non” au coude à coude, une partie de l’opposition s’inquiète des conditions d’organisation du scrutin et de possibles fraudes. Une inquiétude que balaie l’éditorialiste Engin Ardiç dans le quotidien progouvernemental Sabah : “Quand des élections ont lieu en France et que Hollande est élu avec 52 %, les opposants trouvent cela tout à fait démocratique. Si dimanche le ‘non’ l’emporte avec 52 % en Turquie, ils n’y trouveront rien à redire. Mais si c’est le ‘oui’ qui passe à 52 %, dès le lendemain ils commenceront à grommeler. Ils sortiront leurs balivernes habituelles : il y a eu des coupures de courant dans les bureaux de vote, on a volé des urnes électorales… Et ils concluront ‘ce n’est pas acceptable, il faut organiser un nouveau référendum’.”

 

Un scrutin encore très ouvert

Selon des sources du parti au pouvoir, l’AKP, le “oui” devrait l’emporter à 53 %, ce qui fait s’interroger Murat Yetkin dans le très kémaliste – et anti-Erdogan – quotidien Hürriyet : “L’AKP a remporté 50 % des voix lors des dernières élections du 1er novembre 2015. Si on y ajoute les voix du MHP [extrême droite], dont le leader Devlet Bahçeli a rallié le camp du ‘oui’, nous devrions arriver à un score de 60 %, comme le souhaite Erdogan. Mais si l’AKP se place lui-même à 53 %, cela ouvre deux hypothèses. Soit l’AKP considère que très peu des électeurs du MHP voteront ‘oui’ et fait son calcul en conséquence, soit il reconnaît qu’une partie de ses électeurs habituels ont basculé dans le camp du ‘non’. Reste à savoir combien.

 

Selon les sondages, ce sont en effet les électeurs d’extrême droite et les partisans traditionnels de l’AKP qui, en s’abstenant d’aller voter ou en faisant le choix du non’, pourraient faire pencher la balance.

 

L’intellectuel d’origine arménienne Etyen Mahçupyan a été longtemps très proche du pouvoir, en tant que conseiller de l’ancien Premier ministre. Depuis qu’il a quitté cette fonction, il écrit dans le quotidien conservateur et libéral Karar, où il n’a pas hésité à faire connaître ses arguments en faveur du non :

  • Le projet qui nous est présenté est contraire à l’esprit d’un système présidentiel, dit-il.
  • Ce projet peut facilement devenir le régime d’un homme seul et tout-puissant.
  • Le fait que le système constitutionnel actuel soit mauvais ne suffit pas à légitimer un nouveau système tout aussi mauvais.
  • Ce régime de gouvernement, à moyen terme, sera très dommageable pour l’AKPlui-même, pour les conservateurs de ce pays et pour la Turquie toute entière, conclut Etyen Mahçupyan.