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Le Monde, 28.01.2015
par Bernard Lamizet, professeur émérite à l’Institut d’études politiques de Lyon.
Des collègues m’ont fait l’amical honneur de m’inviter à intervenir lors d’un congrès sur la sémiotique des héritages culturels, qui se tiendra, cette année, à Istanbul. Je regrette de ne pouvoir répondre à cette invitation, mais je souhaite expliquer en quelques mots pourquoi il n’est pas possible, aujourd’hui, à un chercheur ou à un intellectuel de se rendre à Istanbul. En effet, dans ce pays, qui fut un pays culturellement riche et actif, il n’est pas possible, aujourd’hui, d’avoir une activité intellectuelle de réflexion et d’analyse.
D’abord, ce sont les droits des femmes et la statut de la femme dans l’espace politique qui sont attaqués, plus encore que menacés. L’égalité entre les hommes et les femmes est « contraire à la nature humaine », a déclaré le président turc, Recep Tayyip Erdogan, lundi 24 novembre. Ces propos permettent de prendre la mesure de la régression intellectuelle et politique que connaît aujourd’hui ce pays.
C’est toute une histoire de luttes, de revendications et de propositions enfin satisfaites qui se trouve ainsi déniée par le chef de l’exécutif turc. Mais, au-delà de la seule question du droit des femmes, ces propos sont significatifs de l’évolution de la culture politique qui règne dans la Turquie d’aujourd’hui. Dans la dénégation de l’égalité entre les hommes et les femmes, c’est l’exclusion des femmes de l’espace public qui se trouve, ainsi, exprimée dans les propos et dans les projets de M. Erdogan.
Mais il faut encore aller plus loin. Tuncay Akgün, le rédacteur en chef de l’hebdomadaire satirique Leman, qui écrit, cité dans Le Monde (10 janvier) : « Nous recevons en permanence des menaces et des réflexions très vulgaires, on peut dire que nous ne sommes jamais tranquilles, toujours soumis au bombardement des tweets et des réseaux sociaux : menaces, insultes, etc. ».
Ces faits montrent qu’aujourd’hui, en Turquie, l’espace public, au sens que le philosophe allemand Jürgen Habermas donne à ce terme, celui d’un espace de rencontre, de communication, de débat et de critique, n’existe plus. Il n’est donc pas possible, en ce moment, de tenir dans ce pays un débat sur la signification des héritages culturels, car c’est la dimension politique de la culture qui se heurte à la dénégation du pouvoir.
Interrogeons-nous sur la signification d’une telle dénégation. On sait que, pour Freud, qui a élaboré ce concept dans le champ de la psychanalyse, la dénégation (Verneinung) n’est pas une simple négation, n’est pas un simple refus : la dénégation manifeste, en en exprimant le contraire, le désir de celui qui s’exprime. Si l’on tente d’élaborer une signification politique du concept de dénégation, si l’on tente d’introduire ce concept dans le champ du politique, la dénégation peut se définir comme la manifestation d’un pouvoir qui empêche la mise en œuvre de l’énonciation ou de la représentation, en exerçant la contrainte d’une censure.
C’est sur ce risque de dénégation de la liberté culturelle par le pouvoir que Nilüfer Göle tentait d’attirer notre attention en parlant des « ambivalences de la nouvelle Turquie » et en évoquant « un risque de despotisme oriental » (Le Monde, 12 août), au lendemain de l’élection de Recept Tayip Erdogan comme président de la République. Cette tendance autoritaire au despotisme, à la censure des expressions et des représentations et au contrôle des mœurs et des pratiques sociales ne s’est pas atténuée dans le temps, et, aujourd’hui, l’Europe se trouve, dans ses relations avec la Turquie, face à trois difficultés politiques, en particulier dans le débat relatif à l’entrée de ce pays dans l’union européenne.
La première difficulté est politique. C’est la question des pouvoirs qui se trouve posée par les pratiques institutionnelles mises en œuvre par le gouvernement turc. Sans doute ce qui a fondé la culture politique de l’Europe se situe-t-il dans le projet politique de laïcité et de liberté d’expression formulé, en particulier, au dix-huitième siècle, par les penseurs comme Montesquieu.
La séparation des pouvoirs, selon Montesquieu, et la laïcité qui, dans toute notre culture, situe la religion dans l’espace privé en ne lui reconnaissant pas de pouvoir dans l’espace politique, sont les protections contre le despotisme et contre les abus du pouvoir. C’est à la condition de la séparation des pouvoirs et de la reconnaissance institutionnelle de la laïcité que le politique peut pleinement fonder un espace public de liberté et d’échange des idées, des projets et des représentations. Aujourd’hui, ces deux conditions font l’objet d’une dénégation par le gouvernement turc.
La deuxième difficulté qui empêche l’établissement avec la Turquie de relations comparables à celles que l’Union européenne peut avoir avec d’autres pays est culturelle : c’est l’identité européenne qui se trouve menacée. D’abord, elle est menacée dans sa signification politique, qui se fonde sur l’exigence de la démocratie, c’est-à -dire de la reconnaissance du pouvoir du démos, du peuple assemblé. Par ailleurs, elle est menacée dans sa dimension esthétique. En effet, les contraintes de la censure et de la limitation des libertés menacent la création et l’expression de la sublimation artistique ou littéraire des identités politiques et des appartenances sociales. Enfin, la culture politique européenne se trouve menacée à son bord, par les logiques turques de la censure des identités comme le montre la censure de l’identité kurde, qui s’est exercée à Kobané au mois d’octobre 2014.
C’est pourquoi, enfin, comme dans tous les débats politiques, nous nous trouvons confrontés à notre propre identité. En ce sens, il est important de se poser aujourd’hui ce que l’on peut appeler la question turque, car elle nous impose de redire ce qui fonde notre propre identité politique. D’abord, elle se fonde sur la laïcité. À cet égard, les tensions qui s’éveillent en Turquie ne font que s’ajouter aux autres tensions que l’on peut connaître dans le monde sur la question de la place de la religion dans la société. Si la laïcité est un impératif de la démocratie, c’est qu’elle garantit que le fait religieux figure parmi les choix singuliers et que la religion ne puisse pas constituer un pouvoir.
Par ailleurs, notre identité politique se fonde sur la place centrale reconnue au débat dans l’espace public. En effet, ce n’est que si le débat est libre que ceux qui y prennent part peuvent exprimer pleinement les idées et les choix dont ils sont porteurs pour la société à laquelle ils appartiennent.
Enfin, notre identité politique se fonde sur l’exclusion de la violence de l’espace public. Qu’il s’agisse du terrorisme, de la violence de la guerre ou de ce que l’on appelle aujourd’hui la violence économique, la violence est ce qui empêche le sujet singulier de vivre pleinement dans la société avec les autres. Ce sont, ainsi, toutes les formes de violence dont il importe de protéger l’espace social dans lequel nous vivons, car la force ne saurait se substituer au droit et à la loi.
Pour toutes ces raisons, il me semble impossible à un chercheur de se rendre en Turquie, aujourd’hui, car il ne pourrait y tenir un discours libre et ouvert. Pour toutes ces raisons, il est impossible à un intellectuel de prendre part à un projet culturel en Turquie, car ce serait manifester une forme de légitimation de la violence qui s’exerce, aujourd’hui, dans l’espace politique de ce pays.
Aller en Turquie serait croire, ou faire croire, que l’espace public y existe pleinement comme l’espace du débat. Ce serait donner une légitimité politique et culturelle à un fantasme ou à une illusion. Penser la notion même d’héritage culturel est impossible dans un pays qui empêche la diffusion, la transmission et l’échange des cultures, des identités et des représentations. Mais, au-delà , sans doute sommes-nous peut-être, aujourd’hui, renvoyés à deux héritages culturels qui pèsent sur notre identité : celui des Croisades, qui figurent, sans doute, dans notre mémoire et dans notre inconscient politique et culturel, l’anticipation de la colonisation, et la prise de Constantinople par les Turcs, en 1453, qui marque, pour nous, la fin de l’empire romain.
Zafer Aknar, directeur de l’hebdomadaire satirique Leman, le 12 janvier
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