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Paris-Normandie, le 12/01/2021
Dieppe – Pays de Bray
« Ça suffit, monsieur, on est dans un état de droit ici, ce n’est pas le problème que Madame vous trompe ou pas ! » Le procureur de la République, Étienne Thieffry, a piqué une petite colère, vendredi 8 janvier 2021 au tribunal de Dieppe, face à un prévenu jaloux maladif. Une obsession qui le conduit à ramener les débats, chaque minute du procès, sur les éventuelles infidélités de sa compagne, alors qu’il devait répondre de harcèlement, d’envois réitérés de messages malveillants et de violences sur sa concubine : une fois le 22 décembre 2020, sans incapacité totale de travail, et un autre fois le 4 janvier 2021, avec une ITT n’excédant pas 8 jours.
« Je n’ai jamais voulu lui faire du mal »
La présidente du tribunal, Gloria Santos, résume l’affaire, expliquant la paranoïa de l’homme, âgé de 42 ans, né en Turquie, arrivé en France en 1999, et qui raconte à tout le quartier de Neuville ses doutes sur la fidélité de sa femme, fouille dans son téléphone portable : « C’est normal, dit-il, elle ne veut pas reconnaître qu’elle me trompe, il faut bien que je sache. » Il lui envoie aussi pas moins de 3 265 SMS en deux mois : « C’était pour qu’on s’organise avec les enfants » , assure-t-il. Interrogé par les enquêteurs, l’un des enfants du couple lâche lors d’une audition : « Papa il perd la tête, il devient fou, il crie toujours. » La compagne est là , à l’audience. Elle décide de porter plainte le 5 janvier, après une scène de violence la veille. « Vous avez été traînée sur 3 m par les cheveux et avez reçu un coup sur la tempe », détaille la présidente.
La victime raconte au tribunal comment, un jour, il l’aurait poursuivie en voiture, et tenté de la percuter, au niveau du rond-point de l’Intermarché. L’homme réfute ces faits, nie les menaces de mort et les insultes, et minimise les violences : « Je n’ai jamais voulu lui faire de mal. » L’avocate de la compagne dépeint le désespoir de sa cliente : « Elle n’en peut plus de cette situation, il faut que ça s’arrête. Elle s’inquiète pour sa santé, pour celle de ses enfants. » La femme le martèle au tribunal, alors que personne ne lui pose la question : « Je ne l’ai jamais trompé ! » Le procureur de la République évoque une personnalité « qui fait froid dans le dos » : « Il nous explique que son comportement est normal, avec une conception de la femme bien particulière, la rabaissant, lui refusant toute autonomie dans sa vie, dans son travail. » Il réclame une peine de dix mois de prison, dont sept avec sursis.
« Il n’a pas la même conception du couple »
L’avocate du prévenu, Me Sandrine Dorange, parle, au contraire, d’un homme respectueux qui, certes, « n’a pas la même conception du couple ». Elle assure qu’en Turquie, sa famille sera abattue en apprenant une éventuelle condamnation. Elle réclame la relaxe pour le harcèlement, les messages malveillants : « Dans aucun des SMS il n’y a de menaces ou d’insultes. » Le tribunal a suivi en partie la plaidoirie, prononçant la relaxe pour les messages malveillants, le harcèlement et les violences sans ITT et prononçant une peine de huit mois de prison dont cinq avec sursis probatoire durant 2 ans pour les violences ayant entraîné une ITT.
F. W.
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