Comment un illustre chroniqueur de la Sublime Porte a-t-il adapté, sinon plagié, en le modifiant, un auteur honni dans l’Empire, le Voltaire de l’article « Histoire » dans L’Encyclopédie? Comment ce chroniqueur a-t-il « ottomanisé », selon la formule d’Edhem Eldem, le texte de Voltaire, au point de recevoir l’aval du sultan?
L’historien s’interroge sur le rapport du monde ottoman au « spectre [qui se cache] derrière Voltaire » : les Lumières.
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Titulaire de la chaire internationale d’Histoire turque et ottomane au Collège de France, professeur à l’Université de Bogaziçi à Istanbul, Edhem Eldem s’attache cette semaine, dans le cadre de sa série consacrée à « L’Empire ottoman et la Turquie face à l’Occident », à analyser la naissance des doutes chez les Ottomans face à une modernité portée par une Europe conquérante et de plus en plus arrogante. La Sublime Porte s’interroge sur l’idée de se transformer, de s’adapter, aux enjeux du XIXe siècle.
L’historien cosmopolite nous plonge dans une passionnante analyse comparée de textes entre l’article « Histoire » de Voltaire et
« l’Histoire (Tarih) de Şanizade Ataullah Efendi, souvent et longtemps vantée pour la « modernité » de son introduction (mukaddime) ».
Edhem Eldem s’interroge sur la manière dont l’historien et chroniqueur au service du sultan, s’est « librement » inspiré de l’illustre article de Voltaire dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Qu’est ce qui est repris? Qu’est-ce qui est modifié? Quels sont les ajouts au texte initial pour l’adapter aux lecteurs ottomans? Quels sont les enjeux de « l’adaptation »?
Et en quoi Edhem Edem « flirte[-t-il] avec un des pires cauchemars de l’historiographie, l’orientalisme »?
Et nous gagnons tout de suite l’amphithéâtre du Collège de France, le 9 février 2018, pour le cours d’Edhem Eldem, aujourd’hui « Vers de nouveaux savoirs, Voltaire plagié? ».