Bienvenue sur le site de l'Association A TA TURQUIE.
A TA TURQUIE, créée en 1989 pour faire connaître la culture turque, à la fois au grand public et aux jeunes générations issues de l’immigration turque, a rapidement développé ses actions pour répondre aux besoins des personnes originaires de Turquie et des responsables chargés des questions sur l'intégration.
Soutenez A TA TURQUIE en adhérant ou en faisant un don en cliquant ici.
A TA TURQUIE, créée en 1989 pour faire connaître la culture turque, à la fois au grand public et aux jeunes générations issues de l’immigration turque, a rapidement développé ses actions pour répondre aux besoins des personnes originaires de Turquie et des responsables chargés des questions sur l'intégration.
Consultez le Pressbook d'A TA TURQUIE d'articles parus dans la presse régionale et nationale depuis 1990 et faites-vous une idée des actions et manifestations organisées par l'Association.
Suivez la presse quotidienne en relation avec la Turquie et retrouvez nos archives d'articles de presse depuis 2001 : La Turquie dans les médias francophones, extrais de la presse turque, l'Europe et la Turquie, immigration, économie... Lire la suite...
Consultez les informations consulaires, les démarches nécessaires pour un mariage franco-turc, valider en France un divorce prononcé en Turquie, demande de visa pour venir en France, recours en cas de refus de visa...
Depuis 1989, A TA TURQUIE publie la revue bilingue Oluşum/Genèse d'art et de littérature. Elle est un outil de communication interculturelle traite de sujets très variés, touchant à la littérature, aux arts et à l'immigration. Elle publie également divers ouvrages (recueils de poèmes, récits, contes...)
L'association vous informe des nouvelles parutions et met à votre disposition une bibliothèque numérique de plusieurs centaines d'ouvrages classés par auteur.
Oluşum/Genèse est une revue bilingue (français/turc) d'art et de littérature. Elle est un outil de communication interculturelle et constitue une plate-forme pour toutes les créations artistiques des jeunes et traite de sujets très variés, touchant à la littérature, aux arts et à l'immigration. Lire la suite...
Abonnez-vous à une revue unique en son genre destinée à tout public institutionnel ou privé pour qui la culture est un support de travail et de réflexion.
Avec plus de 20 ans d’actions culturelles, A TA TURQUIE met à votre disposition son savoir-faire et vous propose sa collaboration pour l'organisation de manifestations culturelles, notamment dans le cadre de l’interculturalité : expositions, conférences, conférence-diapo... Lire la suite...
Avec plus de 30.000 pages vues/mois, A TA TURQUIE vous donne la possibilité d'afficher vos encarts publicitaires pour un public ciblé avec un trafic de qualité.
A TA TURQUIE vous informe des manifestations culturelles en relation avec la Turquie organisées en France dans son agenda. Vous pouvez également ajouter vos propres manifestations dans l'agenda pour une meilleure promotion. Lire la suite...
L’Express, le 07/08/2021
Par Corentin Pennarguear (envoyé spécial à Ankara, Istanbul et Izmir)
Crise économique, Covid-19, scandales, mafia et popularité en chute libre… Au pouvoir depuis dix-huit ans, le président turc vacille pour la première fois de son règne. En Turquie, une question domine : jusqu’où ira-t-il pour garder son trône ? Deuxième volet de notre enquête sur place.
Chapitre 3 : L’escalade de la violence
Izmir, grande cité balnéaire au sud d’Istanbul, est en deuil en ce début juillet. Sur les murs de la troisième ville de Turquie se dessine le sourire d’une jeune femme aux longs cheveux blonds. Deniz Poyraz, 38 ans, est tombée sous les balles le 17 juin dernier, dans les bureaux de son parti politique, le HDP. « Elle adorait les danses folkloriques et cuisiner », raconte, sur les lieux du crime, sa meilleure amie, Hayat Izgi. « Deniz ne vivait que pour les autres, ne rêvait que pour les autres… Et ils l’ont massacrée pour de la politique. »
Hayat, léger voile blanc sur ses longs cheveux noirs, fait défiler les photos de sa camarade, fière militante de ce mouvement de gauche prokurde, toujours le sourire aux lèvres. « Elle nous disait que c’était toujours la même routine : manifestations, arrestations et prison, mais jamais elle n’avait peur ! », rigole Hayat en montrant Deniz en première ligne d’un mouvement social à Izmir.
Toute la journée, des membres du HDP défilent dans les bureaux du parti, viennent se recueillir dans la cuisine, l’endroit exact où Deniz a été abattue, et écrivent un petit mot pour sa famille. Sétif, un Franco-Turc de 46 ans, éclate en sanglots devant le petit autel installé pour rendre hommage à la défunte. « Maintenant, ils viennent nous massacrer chez nous, pour nous montrer que les Kurdes ne peuvent se sentir en sécurité nulle part, même à l’intérieur de nos locaux », lâche-t-il en essuyant ses larmes.
Ce matin-là , un homme s’introduit dans les locaux du parti, une arme à la main. « J’étais en retard de trois minutes, et j’ai entendu les coups de feu, raconte le responsable local du HDP, Abdulkadir Baydur, un regard triste derrière ses petites lunettes noires. Les autres membres du parti étaient à l’aéroport pour accueillir nos députés, nous avions prévu une grande réunion dans nos locaux. Si le tueur était arrivé une demi-heure plus tard, il aurait massacré des dizaines de personnes. » Alors que des policiers stationnent en permanence devant les bureaux du HDP, afin de surveiller ses activités, ils n’interviennent pas et interpellent le meurtrier à sa sortie du bâtiment, dans le plus grand calme. « Que s’est-il passé, mon frère ? », peut-on entendre sur les vidéos de l’arrestation.
Dans sa déposition, Onur Gencer a expliqué son geste par sa « détestation des Kurdes ». Proche des Loups gris, ancien combattant turc en Syrie, cet ultranationaliste dit avoir agi seul, mais le HDP souligne la responsabilité du gouvernement. « Tous les jours, Erdogan pointe du doigt notre parti et nous traite de criminels et de terroristes, soupire Abdulkadir Baydur. Des militants de l’AKP et d’autres organisations proches du pouvoir nous harcèlent à la sortie du bureau, j’avais prévenu le préfet et le ministre de l’Intérieur des menaces pour nos vies… Ils n’ont rien fait. Le message est clair : le gouvernement veut détruire le HDP, et comme il ne peut plus le faire par les élections, il laisse parler la violence. »
Après ce meurtre, le visage de Deniz Poyraz est devenu le triste symbole du déchaînement de haine qui frappe l’opposition en Turquie. Depuis l’alliance d’Erdogan avec les ultranationalistes du MHP, en 2018, des méthodes d’un autre temps ont fait leur retour dans le paysage politique : lynchages, assassinats et intimidations rythment la vie de la fragile démocratie turque.
À Istanbul, ceux qui défendent les minorités doivent rester sur leurs gardes. Même pour un café, dans une petite rue tranquille, un avocat ne parlera de politique qu’à voix basse, jetant des coups d’oeil furtifs derrière lui. « Non seulement les discours politiques haineux sont quotidiens, mais surtout la haine s’est répandue au sein de la société turque, fragmentée en factions rivales », décrit ce jeune juriste, terrifié à l’idée que son nom soit publié dans un journal. « La situation s’est durcie à un point où je ne peux plus parler librement dans la rue ou dire le nom de notre président à haute voix. La répression ne vise pas seulement les Kurdes mais aussi les homosexuels, les féministes… Tous ceux qui ne votent pas pour le parti au pouvoir. »
Les Loups gris, bras armé du MHP et désormais acquis à la cause d’Erdogan, multiplient les opérations coups de poing pour terroriser l’opposition. En avril 2019, quelques semaines après la défaite de l’AKP aux municipales d’Istanbul et d’Ankara, le leader de l’opposition, Kemal Kiliçdaroglu, a été lynché par une foule lors de funérailles, frappé avec des pierres et des bâtons. Il s’en est sorti par miracle. L’été dernier, le député de gauche Baris Atay, l’un des critiques les plus féroces du gouvernement, était battu par un groupe d’hommes dans la rue. Quelques jours avant, une cinquantaine d’ultranationalistes attaquaient la résidence de Meral Aksener, dirigeante du deuxième parti d’opposition. D’autres politiques, anciens alliés d’Erdogan passés dans l’opposition, ont connu le même sort, tout comme des dizaines de journalistes essayant de faire leur travail.
« Plus les sondages sont mauvais pour Erdogan, plus les violences contre les minorités et l’opposition s’accentuent », observe un diplomate européen familier de la Turquie. Fin juillet, la presse turque relayait trois attaques menées par des Loups gris en moins d’une semaine, à Ankara, Afyon et Konya, visant à chaque fois des familles kurdes. Avant de prochaines élections, prévues en juin 2023 et très délicates pour le pouvoir, le pire reste à craindre.
Chapitre 4 : 2021, l’année catastrophique du reis
Chaque dimanche, Sedat Peker s’assoit derrière son large bureau en bois, ajuste le col ouvert de sa chemise et sa chaîne en or, puis demande à son assistant de lancer la caméra. Avec son regard sombre, ses grands gestes et ses cheveux grisonnants, il attire chaque semaine des millions d’internautes turcs, passionnés par ses récits de pots-de-vin, d’attaques de journaux commanditées par le parti présidentiel, de livraisons d’armes à des groupes djihadistes en Syrie ou de trafics de drogue avec l’aide de l’administration. Personne n’est épargné dans le gouvernement tur c
Sedat Peker n’est pas journaliste, mais chef mafieux, ancien proche du pouvoir, désormais en exil aux Emirats arabes unis. Les vidéos de ce lanceur d’alerte dépassent les centaines de millions de vues, et Erdogan ne peut plus balayer les accusations d’un revers de main comme il a su le faire pendant dix-huit ans. Même son ancien Premier ministre (de 2014 à 2016), Ahmet Davutoglu, a dénoncé « un gouvernement qui ressemble en partie à la mafia » dans une interview au journal allemand Der Spiegel, début juillet.
Ce feuilleton hebdomadaire de la corruption en Turquie est d’autant plus difficile à digérer pour les citoyens qu’ils doivent se serrer la ceinture. D’après la Banque mondiale, le Covid-19 a poussé plus de 1,6 million de Turcs dans la pauvreté pour la seule année 2020, et le taux de chômage – 8,2 % en 2012 – approche désormais 14 %. « L’électorat d’Erdogan se contracte fortement, car les difficultés de la Turquie lui sont reprochées personnellement, analyse Jean Marcou, directeur des relations internationales de Sciences-Po Grenoble. Son décrochage dans l’opinion suit le niveau de la livre turque, et le gouvernement montre pour la première fois de réels signes de panique. »
L’économie, principale arme électorale d’Erdogan depuis son arrivée au pouvoir, lui glisse entre les doigts, et les scandales financiers résonnent d’autant plus fort. En juin, alors que l’inflation bondissait encore de 17,5 % et que la livre turque atteignait son plus bas niveau historique, une partie de la presse indépendante dévoilait des photographies d’une nouvelle résidence présidentielle sur les bords de la Méditerranée, avec piscine et plage privée taillée en forme de croissant turc. Sa valeur ? Plus de 65 millions d’euros.
Alors, à Ankara, il n’y a guère que sur les affiches de bord de route, sur fond rouge sans texte, que Tayyip Erdogan garde le sourire. Sa cote de popularité descend pour la première fois sous les 30 %, et le président serait battu dans tous les scénarios si les prochaines élections avaient lieu demain. Pour une fois, le tacticien de l’AKP semble être tombé sur un adversaire plus fort que lui : le Covid-19, qui a mis en lumière les failles du gouvernement turc comme personne avant lui.
« En passant à un régime présidentiel en 2018, Erdogan a concentré le pouvoir dans ses mains et les décisions de tout un pays reposent sur un petit groupe de conseillers, déclare le chercheur du Washington Institute Soner Cagaptay. Sa stratégie a longtemps consisté à rendre les ‘élites’ responsables de tous les problèmes de la Turquie, mais il s’est lui-même privé de cette option. » Depuis le début de la crise, le gouvernement central a toujours eu un temps de retard par rapport aux mesures sanitaires prises par les municipalités, gérées par l’opposition. Dès mars 2020, par exemple, les maires d’Istanbul et d’Ankara ont lancé des cagnottes populaires afin de venir en aide aux plus pauvres touchés par le confinement. Vexé, le gouvernement a d’abord interdit l’initiative, avant de la copier au niveau national quelques jours plus tard.
La confiance entre Ankara et la population a aussi souffert quand, en septembre 2020, un député a révélé, documents à l’appui, que le nombre réel de contaminations au Covid-19 était 20 fois supérieur aux chiffres officiels. Là encore, les maires d’Istanbul et d’Ankara ont pu souligner le manque de transparence du gouvernement Erdogan en affirmant que leurs chiffres locaux ne correspondaient absolument pas aux statistiques nationales. Officiellement, le Covid-19 a provoqué 51 000 morts en Turquie, pour six millions de cas. En comparaison, avec un nombre de contaminations similaire, la France déplore 112 000 morts.
En chute libre dans l’opinion, confronté à une crise qui n’en finit pas, Erdogan tente de remobiliser sa base la plus fidèle, composée des islamistes et des nationalistes. Ainsi, à la surprise générale, le président turc a décidé de retirer son pays de la Convention d’Istanbul, traité international de lutte contre les violences faites aux femmes, le 1er juillet, alors qu’il avait été le premier dirigeant international à la signer en 2012… « Ce retrait est un signe de faiblesse terrible pour Erdogan, analyse le politologue Taner Dogan. Il y a quelques années, il n’aurait eu aucun intérêt à sortir d’un traité défendant les droits de la moitié de la population, mais il doit désormais se plier aux désirs de ses alliés islamistes et ultranationalistes sur les questions religieuses et familiales. » Otage de ses complices du MHP, Erdogan s’est mis à dos tout le reste de la population : même les associations de femmes proches de son parti, l’AKP, lui ont exprimé leur profond désaccord et seuls 47 % des membres du parti présidentiel approuvent cette décision.
La sortie de la Convention d’Istanbul n’a pas énervé que les Turques mais aussi un certain Joe Biden, qui ne s’est pas privé de critiquer une décision « profondément décevante ». Si, sur la scène intérieure, Erdogan doit jongler avec les crises, il doit aussi affronter le nouveau locataire de la Maison Blanche. Pendant quatre ans, le président turc a été choyé par son homologue de Washington, Donald Trump, fan absolu des hommes forts, autoritaires et des contrats faciles. Erdogan a pu développer sa politique expansionniste en Libye ou en Méditerranée orientale sans craindre de représailles américaines, et il en a largement profité. Mais l’arrivée de Biden change la donne : en campagne, le candidat démocrate avait décrit Erdogan comme un « autocrate » et suggérait de « soutenir l’opposition démocratique » en Turquie. Une fois installé dans le Bureau ovale, le président américain a ignoré son homologue turc, ne lui téléphonant que trois mois après son investiture, et seulement pour l’informer de sa reconnaissance prochaine du génocide arménien, commis par l’Empire ottoman en 1915. Un camouflet pour Erdogan.
Volontiers agressif sur la scène internationale, comme peut en témoigner Emmanuel Macron, le président turc a au contraire adouci le ton depuis l’élection de Biden et cherche une nouvelle voie en politique étrangère. « Pour la première fois depuis de nombreuses années, Erdogan estime qu’il a davantage besoin de Washington que l’inverse, avance Soner Cagaptay. Il est persuadé qu’il doit vendre une relation apaisée avec les Etats-Unis et l’Europe pour attirer les investisseurs étrangers et renouer avec la croissance économique. Sa survie politique en dépend. » Le vieux sage Joe Biden, 78 ans, le sait, et il pourrait bien faire payer au sultan d’Ankara ses errements.
â—Š
Copyright 2014 - A TA TURQUIE - Toute reproduction strictement interdite - Realisation : SOUTREL Dominique - Contactez-nous
Association A TA TURQUIE - 43 rue Saint Dizier - 54000 Nancy / FR - Tél. : 03 83 37 92 28 - Fax : 09 58 77 68 92 - contact@ataturquie.fr
Remerciements à COPLU pour les illustrations du site
Pour tout don, vous pourrez en déduire 66% de vos impôts