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Le Monde, le 10/01/2020
TRIBUNE
par Olivier Bouquet, historien
Le président turc justifie l’envoi de ses troupes au nom du passé dans un pays qui fut ottoman jusqu’en 1912. Il instrumentalise l’histoire pour justifier son expansionnisme et, surtout, pour se maintenir au pouvoir, analyse, dans une tribune au « Monde », l’historien ottomaniste Olivier Bouquet.
Le président Erdogan déploie des forces en Libye. Comme en Syrie ? Pas exactement. La Turquie a voulu s’impliquer dans la crise syrienne autant qu’elle a été victime de sa géographie. Erdogan fait le choix de l’expansionnisme en Libye et en Méditerranée pour garder le pouvoir. La politique de l’histoire est au cœur de sa stratégie internationale. Pour justifier une présence militaire en Libye, il convoque le passé ottoman.
En réponse à la question posée par l’opposition : « Qu’avons-nous à faire en Libye ? », il développe une lecture présentialiste du passé : les Ottomans sont de retour ; ils étaient attendus. C’est un empire à reconstituer, au moins dans les espaces conquis par les sultans. Plusieurs arguments sont développés.
Le premier argument est anticolonial. D’une part, la Turquie se lance en Libye pour lutter contre un « nouveau Sèvres ». Signé en 1920, ce traité avait réduit l’Empire ottoman à un Etat croupion. Ankara mobilise le complexe de Sèvres, ô combien fondateur de la Turquie moderne, pour organiser une riposte en légitime défense face à un complot des puissances coloniales roum et leurs alliés d’hier (Chypre, la Grèce) et d’aujourd’hui (Israël, l’Egypte de Al-Sissi et les Emirats arabes unis). En 1912, les provinces libyennes furent cédées à l’Italie par un traité à Lausanne. C’est aussi à Lausanne que fut signé, en 1923, le traité fixant les frontières actuelles de la Turquie. Le président turc joue sur les résonances entre les deux Lausanne.
Le second argument est néo-ottoman. La Libye fut ottomane. Pourtant, la Libye, ce n’est pas la Bosnie, l’Albanie ou la Macédoine, le cœur de l’Empire dès le XVe siècle. Les Ottomans ne contrôlèrent la Cyrénaïque et la Tripolitaine que sur ses côtes, et tardivement : seulement à partir du milieu du XVIe siècle. Peu de temps : en 1711, une dynastie semi-autonome, les Karamanli, s’imposa. En 1835, les Ottomans reprennent le contrôle de la région. Ils y implantent, difficilement, une administration territoriale, qui se heurte à l’hostilité des pouvoirs locaux et de la Sanûssiya, la plus redoutée des confréries musulmanes au Sahara. Il n’empêche, c’est une présence ancienne, non assimilatrice, respectueuse de l’islam nord-africain. Bref, les Turcs connaissent bien la Libye et respectent ses populations.
« Renaissance de la puissance turque »
Le troisième argument est celui de la « renaissance de la puissance turque ». Il légitime l’expansionnisme, en mobilisant la mémoire collective d’un déclin accéléré par la défaite en Libye. La nation s’est forgée dans le « traumatisme de la peau de chagrin ottomane », selon la formule de l’historien Stéphane Yerasimos. La guerre balkanique de 1912 marque la disparition d’une domination vieille de cinq siècles en Europe. Elle coïncide avec l’effacement de la présence ottomane en Afrique du Nord. C’est le début de la fin de l’Empire. C’est aussi le début de la nation turque en armes. Les deux histoires se lient en Libye et se prolongent dans les Balkans. Elles s’incarnent chacune en un homme et en un combattant.
Il y a celui de la nation : Mustafa Kemal, le futur Ataturk. Il s’est battu dans la ville libyenne de Tobrouk contre les Italiens, comme ensuite à Gallipoli, contre les Anglais et les Français. Pour Ankara, cette référence est précieuse : l’erdoganisme est un post-kémalisme. Il ne saurait être un anti-kémalisme. Et il y a l’Empire avec la figure d’Enver. La presse turque fait la différence avec le même Enver devenu pacha en 1914 et acteur majeur du génocide des Arméniens. L’Enver de 1911 est impérial. Il est le mari d’une fille de sultan.
Longtemps, Enver fut une figure honnie par le régime kémaliste qui en faisait le symbole d’une politique qui a conduit à la déroute de 1918 et à l’effondrement ottoman. En 1919, Mustafa Kemal lance la guerre de libération nationale et fonde la République. Aujourd’hui, Enver est une figure réhabilitée, centrale, de l’erdoganisme. Kemal et Enver étaient des rivaux du nationalisme turc. Comme figures ottomanes, ils sont associés. Où ? En Libye. Tous deux s’y retrouvent. Une photographie existe d’eux. Côte à côte, ils semblent sourire. Ils combattent ensemble pour le sultan, mais aussi pour la nation turque menacée par les puissances coloniales. Le gendre impérial et le père des Turcs.
« Dans la rhétorique d’Erdogan, les “Etats coloniaux” – la Grèce, Chypre, Israël et leurs alliés d’aujourd’hui – veulent redécouper la Méditerranée. Il est impératif de leur barrer la route »
Le quatrième argument est généalogique. Les Balkans font partie d’une aire culturelle turque. Pas la Libye. Il faut trouver d’autres liens historiques. L’erdoganisme développe une double généalogie. Les Turcs viennent tous de l’Empire : chaque citoyen a un ancêtre ottoman, sinon musulman, hors des frontières de l’actuelle Turquie. Les citoyens des territoires anciennement ottomans ont tous un ancêtre venu d’Anatolie, donc de Turquie. Dont acte.
Sur les réseaux sociaux, la nouvelle est partout : Faïez Sarraj, le chef du gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale, est d’origine turque. Son ancêtre direct, Mustafa, venait de Manisa, en Anatolie : en 1840, il est parti comme soldat en Libye. Preuves à l’appui. Un extrait de livre de souvenirs rédigé par le père du président libyen a été diffusé sur les réseaux : il atteste que celui-ci est « d’origine turque ». Les liens ont été maintenus : en 1954, le père de Sarraj est venu rendre visite à ses parents turcs.
Pour l’erdoganisme, tout ce qui a été ottoman, la Crète, Chypre, les îles ioniennes, est naturellement amené à le redevenir. Dans la rhétorique d’Erdogan, les « Etats coloniaux » – la Grèce, Chypre, Israël et leurs alliés d’aujourd’hui – veulent redécouper la Méditerranée. Il est impératif de leur barrer la route.
Comme le kémalisme, l’erdoganisme est un « anti-impérialisme nationaliste ». Sa boussole reste islamiste, mais son mode d’action est un pragmatisme syncrétique. Il convoque tout ce qui a fait son succès, mais à des degrés différents, en fonction du terrain choisi : à la fois anticolonial et néo-ottoman, islamiste et kémaliste, nationaliste et généalogique. Autant de fils que le président Erdogan tire séparément ou ensemble dans une projection permanente du passé sur son destin politique, avec un seul et même but : se maintenir au pouvoir.
Olivier Bouquet est professeur d’histoire ottomane à l’université Paris-Diderot, auteur notamment des Ottomans.
Questions d’Orient (La documentation française, « Documentation photographique », 2018).
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