Le projet de révision constitutionnelle visant à renforcer les pouvoirs du président turc, Recep Tayyip Erdogan, a été adopté par le Parlement en seconde lecture, samedi 21 janvier. Il doit désormais être soumis à un référendum, qui se déroulera au printemps.
La victoire a été assurée grâce à l’alliance entre le Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur), au pouvoir, et le Parti d’action nationaliste (MHP, droite nationaliste). Le texte, qui comporte 18 articles, a obtenu 339 voix, soit neuf de plus que la majorité des trois cinquièmes requise pour que la réforme soit soumise à la consultation populaire.
« Notre nation prononcera le dernier mot sur ce sujet. Elle donnera la décision finale », a déclaré le premier ministre, Binali Yildirim, à l’issue du scrutin. « Que personne n’en doute, notre nation prendra (…) la plus juste des décisions. » Et ce dernier d’assurer que le projet profiterait à tous, en permettant un « gain de temps » pour la gestion du pays.
Dérive autoritaire
Cette réforme constitutionnelle permet de transfèrer au président le pouvoir exécutif qui jusque-là appartenait au premier ministre, dont le poste disparaît – une première depuis la fondation de la Turquie moderne par Mustafa Kemal Atatürk, en 1923. Avec la nouvelle Constitution, le chef de l’Etat aura le pouvoir de nommer ou limoger les ministres.
Les élections législatives se tiendront désormais en même temps que l’élection présidentielle, tous les cinq ans, contre quatre actuellement. Le nombre de députés passera de 550 à 600.
La Constitution actuelle, votée en 1982, garantit l’indépendance de la justice face à l’exécutif. Si la réforme est définitivement adoptée, le président pourra intervenir directement dans le fonctionnement de la justice. Aux termes de la nouvelle réforme, le président et le Parlement choisiront ensemble quatre membres du Haut Conseil des juges et procureurs, chargé de nommer et de destituer le personnel du système judiciaire. Le Parlement en choisira seul sept membres.
L’opposition (Parti républicain du peuple, CHP) dénonce une dérive autoritaire du pouvoir de Recep Tayyip Erdogan, alors que des purges en série ont suivi le coup d’Etat manqué du 15 juillet 2016. L’AKP justifie de son côté cette évolution vers un régime présidentiel par le besoin de renforcer la Turquie, soumise à la menace terroriste de l’organisation djihadiste Etat islamique et de la rébellion kurde.
Aux termes de la réforme constitutionnelle, le président Erdogan pourrait en théorie briguer deux nouveaux mandats et ainsi se maintenir au pouvoir jusqu’en 2029.
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