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Le Figaro, le 04/11/2020
Par Delphine Minoui, Correspondante à Istanbul
ENQUÊTE – De la Syrie au Haut-Karabakh, en Irak, à Chypre ou encore en Libye, jamais la Turquie n’a été autant engagée en dehors de ses frontières. La politique étrangère du président turc s’appuie aujourd’hui sur l’armée pour peser de tout son poids sur l’échiquier mondial.
Quelle ironie du destin! Attablé à la terrasse de ce café surplombant les eaux turquoise du Bosphore, Cem Gürdeniz n’en revient toujours pas de se retrouver autant sous le feu des projecteurs. Lui, l’ex-contre-amiral kémaliste à la retraite, emprisonné de 2011 à 2014 par l’islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan et ses alliés gülenistes de l’époque, et dont la doctrine de la «Patrie bleue» (Mavi Vatan) est aujourd’hui reprise… par le président turc! L’idée, née en 2006 et théorisée dans un livre rédigé lorsqu’il était derrière les barreaux, consiste à revendiquer la souveraineté d’Ankara sur une zone de 462.000 km2 en mer Noire, en mer Egée et en Méditerranée. «Elle n’a rien de néo-ottamaniste, ou de pan-islamiste», prévient ce fervent laïc, francophone et francophile, en dépliant une carte à faire bondir les Grecs, où la Turquie se constitue un large bouclier maritime lui donnant accès aux gisements gaziers récemment découverts. «Mon seul souci, insiste-t-il, c’est de protéger les intérêts de l’État turc. Je n’ai jamais soutenu le gouvernement actuel. Ce que fait Erdogan en évoquant la “Patrie bleue”, c’est purement opportuniste!» Opportuniste, mais également révélateur d’un chef d’État aux abois qui jongle aujourd’hui entre islamisme et nationalisme pour asseoir son pouvoir au-delà des frontières de son pays. Et qui a fait du militaire le nouvel instrument de sa politique étrangère.
À 66 ans, l’homme fort de la Turquie n’est pas à un paradoxe près. Longtemps, son parti, l’AKP, au pouvoir depuis dix-huit ans, s’est attelé à affaiblir l’armée pour briser l’héritage d’Atatürk. Démilitarisation des institutions, purges, procès… Mais c’était avant le 15 juillet 2016. Avant que les blindés et les F-16 ne tentent de le renverser lors d’un putsch avorté imputé à son ex-acolyte, le prédicateur en exil Fethullah Gülen. La punition est fatale: des milliers d’hommes en uniforme sont arrêtés et purgés. À ce jour, le grand ménage a touché au moins 40 % des hauts gradés. Mais alors que le monde entier pensait l’institution militaire décimée, Erdogan crée la surprise dès le mois d’août 2016 en envoyant ses troupes à l’assaut du Nord syrien. Jaraboulous, dernier verrou aux mains de l’État islamique, tombe. L’opération, baptisée «Bouclier de l’Euphrate», vise aussi à «nettoyer» la frontière des milices kurdes accusées de collusion avec le PKK. Depuis, deux autres offensives d’envergure, en 2018 et 2019, ont permis à la Turquie de les repousser à plus de 30 kilomètres de son territoire et d’établir de mini-protectorats. Une victoire pour Erdogan qui a fait d’une pierre deux coups: tuer le rêve d’une enclave autonome kurde et, en interne, affaiblir ses ennemis du parti laïc prokurde HDP.
Un nouveau système présidentiel
Ces opérations, qui illustrent une nouvelle alliance stratégique avec les ultranationalistes du MHP, signalent également une redéfinition du rôle de l’armée turque, la deuxième de l’Otan en effectifs. «Les missions antiterroristes de l’armée, longtemps cantonnées aux frontières intérieures de la Turquie, se sont réorientées vers l’extérieur des frontières», observe Sümbül Kaya, spécialiste de l’armée turque et chercheuse rattachée à l’Institut français des études anatoliennes. À la politique du «zéro problème avec les voisins» du début des années 2000 se substitue un aventurisme militaire doublé d’une défiance envers l’Occident. Sur fond de crise des migrants, les relations s’enveniment avec l’Europe. Avec les États-Unis, la confiance est rompue: Washington est accusé de soutenir le «terrorisme» en armant les Kurdes de Syrie dans sa lutte anti-Daech et en refusant d’extrader Gülen, réfugié en Pennsylvanie. Faute de pouvoir se procurer de nouveaux avions de chasse américains, et au risque de fâcher ses alliés de l’Otan, la Turquie diversifie son portfolio en achetant des S-400 à la Russie. «À partir de cette date (15 juillet 2016 NDLR), la Turquie est totalement sortie de l’influence occidentale dans ses engagements politiques mondiaux et s’est focalisée sur elle-même tout en élaborant une politique équilibrant les pays tels que la Russie et la Chine, avec les pays occidentaux», étaye dans une étude Can Acun, du think-tank turc pro-gouvernemental Seta.
Erdogan s’est imposé comme la clef de voûte de l’armée (…).
Une armée aux ordres, destinée à appliquer la stratégie militaire du président
Sümbül Kaya, spécialiste de l’armée turque et chercheuse rattachée à l’Institut français des études anatoliennes
Pendant ce temps, Erdogan resserre son étau sur les militaires. Que ce soit par décret-loi ou, à partir de 2018, grâce au nouveau système présidentiel, il affaiblit le rôle du chef d’état-major en renforçant celui du ministère de la Défense. Il s’autorise même à contourner ce dernier pour passer des ordres en direct aux différents états-majors (terre, air, marine). «Erdogan s’est imposé comme la clef de voûte de l’armée (…). Une armée aux ordres, destinée à appliquer la stratégie militaire du président», analyse Sümbül Kaya. Paranoïa oblige, le reis d’Ankara s’entoure d’hommes de confiance. Hulusi Hakar, l’ex-chef d’état-major, est promu ministre de la Défense pour avoir résisté aux putschistes. Issu d’une famille conservatrice d’Anatolie centrale, il est aux côtés du président lors d’un pèlerinage à La Mecque ou encore dans le rôle de témoin du gendre d’Erdogan au mariage de sa fille. Les généraux poussés à la retraite anticipée sont, eux, remplacés par des personnalités jugées plus loyales. Quant au Haut Conseil militaire, chargé des promotions, il est désormais majoritairement composé de membres du gouvernement. «Lors de nominations, les logiques politiques peuvent ainsi prédominer sur des logiques administratives ou méritocratiques», note Sümbül Kaya.
Pour autant, plusieurs courants de pensée continuent à être représentés au sein de l’armée. Tandis que les atlantistes, accusés d’être pro-Gülen, sont purgés, les souverainistes et les eurasistes pro-Russes font un retour en grâce à la faveur du rapprochement AKP-MHP. Dans les émissions télévisées, place aux discours martiaux assortis de vidéoclips mariant la nostalgie de l’Empire ottoman, thématique si chère à Erdogan, aux arguments nationalistes sur la nécessaire défense du pays au-delà de ses frontières. «En Turquie, on assiste à une militarisation des relations internationales. Ayant épuisé toutes ses options diplomatiques, le président turc cherche à compenser ses erreurs en affirmant son pouvoir militaire. Son mariage d’intérêt avec les nationalistes le pousse d’autant plus dans cette voie», remarque Ilhan Uzgel, enseignant-chercheur en relations internationales.
Au printemps 2020, Erdogan passe à la vitesse supérieure en mettant le cap sur la Libye. À renfort de drones et de supplétifs syriens pilotés par des experts turcs, Ankara vole au secours du Gouvernement d’union nationale de Fayez al-Sarraj, chasse de Tripoli les troupes du maréchal Haftar et sanctuarise sa présence en établissant des bases militaires stratégiques. «Avec la Libye, on est passé d’une posture défensive à une posture offensive», relève Sümbül Kaya. Depuis, la Turquie est embarquée dans un cycle infernal de tempêtes à répétition. Elle déploie ses navires de forage en Méditerranée, frôle la confrontation militaire avec la marine grecque, menace un navire français pour empêcher le contrôle d’une frégate soupçonnée de contourner l’embargo sur les armes. Elle ranime le contentieux chypriote. Elle s’ingère dans la guerre entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie. De nouvelles frappes anti-PKK en Irak et une quatrième incursion en Syrie seraient également à l’ordre du jour. Autant d’occasions lui permettant d’élargir sa sphère d’influence, qui s’étire jusqu’au Soudan et à la Somalie. «En démultipliant les crises, Erdogan cherche à occuper le débat public et à dominer l’agenda politique. Il entretient l’image d’un leader fort qui se bat pour son pays tout en s’efforçant par tous les moyens de maintenir sa base électorale à l’heure où l’économie du pays va mal», estime Ilhan Uzgel.
Une rhétorique agressive
Son appétit énergétique pèse évidemment dans la balance. La découverte d’importants gisements gaziers en Méditerranée orientale suscite la convoitise des pays de la région et pousse les uns et les autres à redessiner les cartes. Quand l’Europe crie au scandale après la signature, en novembre 2019, par Ankara et Tripoli d’un accord de délimitation maritime lui donnant accès à des zones contestées, la Turquie dénonce à son tour le projet de gazoduc EastMed signé en janvier 2020 par la Grèce, Chypre et Israël. Quand, début août, la Grèce et l’Égypte s’accordent sur une zone économique exclusive, elle riposte en dépêchant son bateau de recherche sismique, l’Oruç Reis, escorté de trois frégates militaires, dans les eaux chypriotes. Depuis, les allers-retours en mer du navire font office de moyen de pression. Au risque d’attiser les tensions. «Partant du principe qu’elle n’est pas à son avantage en Méditerranée, la Turquie fait tout pour se faire accepter comme acteur régional incontournable», commente le chercheur Emre Kursat Kaya, du think-tank Edam.
Le nouveau «hard power» turc va de pair avec une industrie militaire en pleine expansion. Fabrication de drones, de sous-marins, de frégates… Erdogan n’a qu’une obsession: réduire sa dépendance à l’égard de l’Occident et trouver des débouchés à l’étranger – comme c’est déjà le cas avec l’Azerbaïdjan, équipé en drones TB2 actuellement utilisés contre l’Arménie. «Le budget militaire turc augmente chaque année. En 2019, il représentait 18 milliards de dollars, c’est-à-dire 1,9 % du PIB. Pour 2020, il a été évalué à hauteur de 25 milliards de dollars», remarque Sümbül Kaya.
L’expansionnisme militaire reste un pari risqué. Si une majorité de la population adhère actuellement à la rhétorique agressive du pouvoir, la crise économique est une réalité difficile à masquer. En misant autant sur l’armée, «Erdogan prend également le risque de l’inversement du rapport de force en faveur de l’armée», selon Dorothée Schmid, responsable du programme «Turquie contemporaine» à l’Ifri. La récente démission de l’amiral Cihat Yayci, l’un des architectes de l’accord turco-libyen, pourrait aussi signaler la persistance de divisions internes au sein de la coalition contre-nature entre islamistes et nationalistes.
Quant à l’escalade en Méditerranée, elle court le risque de se retourner contre Ankara. «C’est une chose de lancer l’assaut contre Daech ou les milices kurdes en Irak et en Syrie, ou de combattre les forces de Haftar en Libye, c’en est une autre de se confronter à la Grèce et la France», observe Ilhan Uzgel. Mais, pour nombre d’experts, il s’agirait d’une provocation calculée pour faire monter les enchères avant d’entamer des tractations.
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