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Le 05/10/2018
Par Marie Jégo
Cet ecclésiastique évangélique, accusé d’espionnage et retenu depuis deux ans, est au cœur d’un conflit majeur entre Washington et Ankara.
Il y a quelque chose de démesuré dans le destin d’Andrew Brunson. Comme un décalage entre son personnage de modeste pasteur évangélique américain installé en Turquie depuis vingt-cinq ans et le tumulte diplomatico-économique en cours autour de lui. Ce quinquagénaire, accusé par la justice turque d’espionnage militaire et de collusion avec des « organisations terroristes », doit comparaître le 12 octobre devant un tribunal à Izmir (ouest de la Turquie). A elle seule, la salle d’audience incarne le côté surréaliste du dossier : un ancien terrain de basket-ball aménagé en tribunal après la tentative de coup d’Etat de juillet 2016 pour y juger 270 militaires factieux. Un décor à l’évidence trop vaste pour ce prévenu à l’apparence on ne peut plus discrète : silhouette frêle, visage doux, yeux bleu vif derrière des lunettes cerclées de métal.
Comment ce pasteur sans histoires, dont l’église, à Izmir, est si petite qu’il est possible de passer devant sans la voir, a-t-il pu devenir l’enjeu d’une crise majeure entre les deux alliés de l’OTAN et leurs deux présidents impulsifs, Donald Trump et Recep Tayyip Erdogan ? Arrêté lors des purges consécutives au coup d’Etat raté, Andrew Brunson est notamment accusé de lien avec le mouvement du prédicateur Fethullah Gülen, installé aux Etats-Unis – le cerveau de la tentative de coup d’Etat, d’après Ankara – et le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). S’il est reconnu coupable, il risque trente-cinq ans de prison. Une hypothèse inacceptable pour Donald Trump et pour son vice-président, Mike Pence, lui-même membre de l’Eglise évangélique presbytérienne (EPC), la congrégation du pasteur emprisonné.
A l’approche des élections de mi-mandat aux Etats-Unis, début novembre, M. Trump est résolu à batailler ferme. Après avoir réclamé le « retour à la maison » de ce « formidable chrétien et père de famille », il a fini par sortir le bâton des sanctions contre la Turquie, précipitant l’effondrement de la monnaie nationale en août, et s’attirant les foudres de son homologue. « Vous osez sacrifier la Turquie et ses 81 millions d’habitants pour un pasteur en relation avec des groupes terroristes ? », a tonné M. Erdogan, menaçant d’orienter son pays vers« de nouvelles alliances ».
« Je n’ai jamais rien fait contre la Turquie. Au contraire, je l’aime, je prie pour elle depuis vingt-cinq ans »
Lors de sa première comparution, le 16 avril, Andrew Brunson était apparu anéanti, comme perdu dans la salle aux trois quarts vide. Le moral brisé par dix-huit mois passés en cellule d’isolement, il avait fondu en larmes, avant de déclarer au juge, dans un turc impeccable : « Je n’ai jamais rien fait contre la Turquie. Au contraire, je l’aime, je prie pour elle depuis vingt-cinq ans. Je suis innocent, la vérité doit éclater. Je récuse les charges portées contre moi. »
Sa vie a viré au cauchemar le 7 octobre 2016. Ce jour-là , il se rend à une convocation de la police d’Izmir. Persuadé qu’il s’agit d’une simple formalité liée au renouvellement de son permis de séjour, il est loin de se douter qu’il passera derrière les barreaux ses deux prochains anniversaires. Sa femme, Norine, l’accompagne. Elle aussi est interpellée, puis libérée deux jours plus tard. Andrew Brunson est interrogé par les services antiterroristes, puis transféré de cellule en cellule, sans mise en examen avant de longs mois. Une situation difficile à supporter pour cet amoureux de la Turquie – il y a passé la moitié de son existence. Nul étranger ne la connaît mieux que lui. Familier des usages locaux, féru d’histoire, il en maîtrise la langue.
Paradoxe
Originaire de Black Mountain, en Caroline du Nord, il avait 25 ans lorsqu’il a été choisi par l’EPC pour aller prêcher la bonne parole en Turquie. En 2000, le couple Brunson et ses trois enfants s’installent à Alsancak, un quartier populaire et animé d’Izmir. C’est là , dix ans plus tard, qu’il ouvrira l’église de la Résurrection. A l’époque, les fidèles ne sont qu’une trentaine, mais il leur consacre l’essentiel de son temps, conduisant les offices, baptisant les convertis. Charitable, il se mobilise aussi en faveur des handicapés, aide les réfugiés des conflits syrien et irakien, notamment des Kurdes yézidis, à remplir leurs dossiers de demande d’asile dans des pays tiers, ce qui figure désormais à charge dans son dossier d’accusation.
D’après Armand Aupiais, doctorant et chercheur associé à l’Institut français des études anatoliennes (IFEA) à Istanbul, Izmir – une ville de 4 millions d’habitants, aisée, progressiste, ensoleillée – constitue un « terrain propice à l’expression de nouvelles religiosités, évangéliques, soufies [courant mystique de l’islam], médiumniques, thérapeutiques… ». Ce tournant est récent. « Selon l’interprétation que fait la Turquie du traité de Lausanne de 1923, seuls les juifs, les Arméniens et les Grecs sont officiellement reconnus comme des minorités religieuses, poursuit le chercheur, qui suit de près l’évolution des évangéliques en Turquie. Les autres courants religieux étaient dans une situation compliquée jusqu’en 2004, date à laquelle de nouvelles lois, adoptées dans le cadre de la mise en conformité du pays avec les critères européens, leur ont permis de se constituer en associations. A partir de 2008, 2009, ils ont pu exister sans trop de problèmes. Aujourd’hui, leurs relations, avec, par exemple, les mairies des localités où ils sont installés, sont plutôt cordiales. »
Tout le paradoxe de l’affaire Brunson est là . « Elle a éclaté au moment où le courant religieux évangélique n’a jamais été aussi reconnu par les autorités d’Ankara », estime M. Aupiais. Les fidèles de la Résurrection – pour beaucoup des Turcs, des Iraniens, des Azéris convertis – en savent quelque chose. S’ils furent par le passé confrontés à des insultes, à des menaces, voire à des jets de cocktails Molotov sur les murs de l’église, rien de tel aujourd’hui. Comme les 5 000 à 10 000 évangéliques de Turquie, ils sont peu enclins à se laisser enfermer dans un statut de minorité, et se revendiquent turcs et apolitiques.
« Une phrase, un Tweet de trop, et les négociations qui ont lieu de façon discrète pourraient achopper »
A l’église de la Résurrection, les offices sont désormais célébrés par un autre pasteur. L’endroit est en règle avec la loi, comme en atteste le panneau qui, sur le seuil, stipule que « les mineurs non accompagnés par des adultes ne sont pas autorisés » à entrer. Les journalistes, eux, ne sont pas les bienvenus. Alors que renaît l’espoir d’une libération d’Andrew Brunson – peut-être même à l’audience du 12 octobre –, la congrégation a demandé à ses ouailles d’éviter les médias. « Une phrase, un Tweet de trop, et les négociations qui ont lieu de façon discrète pourraient achopper », confie un familier des lieux.
Marchandage en cours
De fait, un marchandage est en cours. La partie américaine veut le retour du pasteur « à la maison ». Mais les Turcs insistent pour que Mehmet Hakan Atilla, un dirigeant de Halkbank, la banque publique du pays, détenu aux Etats-Unis pour sa contribution au contournement des sanctions vers l’Iran, fasse partie de l’échange. Entre 2010 et 2015, Halkbank aurait fait gagner à la République islamique des milliards de dollars en devises en échange de ses hydrocarbures par le biais d’un schéma financier opaque (trafic d’or, fausses factures, pots-de-vin), mis en place avec la bénédiction du gouvernement turc. Ankara se démène pour obtenir une ristourne sur l’amende dont la banque devra s’acquitter aux Etats-Unis.
Si aucun compromis n’est trouvé, des sanctions supplémentaires sont à craindre. Un nouvel effondrement de la livre turque, qui a déjà perdu 40 % par rapport au dollar depuis janvier, serait fatal. Car la crise n’épargne pas les représentants de cette classe moyenne que M. Erdogan et son Parti de la justice et du développement (AKP) se targuent tant d’avoir fait émerger depuis leur arrivée au pouvoir, en 2002. Prolonger la brouille avec l’allié américain est risqué. L’économie turque est dépendante du billet vert pour combler son déficit des comptes courants et rembourser la dette de son secteur privé (65 % du PIB). Dans ces conditions, deux solutions s’offrent aux autorités turques : libérer le pasteur, au risque de perdre la face, ou assumer les conséquences d’une rupture avec Washington.
« Ça ne tient pas debout. Il était dévoué à son Eglise, la politique ne l’intéressait pas »
A Alsancak, non loin de l’église, des policiers gardent le logement des Brunson, un appartement avec un balcon et aux fenêtres grillagées, dans un immeuble de type HLM. Le pasteur est à l’intérieur, placé aux arrêts domiciliaires depuis le 25 juillet, un bracelet électronique à la cheville. Le jour de son retour chez lui, des dizaines de personnes l’attendaient, certaines aux cris d’« Andrew, on t’aime ». Sa femme, elle, est libre d’aller et venir dans le quartier. Jusqu’ici, le tribunal a refusé toutes les demandes de remise en liberté. « Il y a un léger espoir dans le sens d’une libération », concède son avocat, Me Ismaïl Cem Halavurt. La nomination récente d’un nouveau procureur est perçue comme un signe encourageant. En attendant, les partisans d’Andrew Brunson jugent les accusations « trop absurdes pour être vraies ». « Je ne peux pas y croire une seule seconde, assure un évangélique d’Izmir, soucieux d’anonymat. Ça ne tient pas debout. Il était dévoué à son Eglise, la politique ne l’intéressait pas. »
Théories du complot
A bien y regarder, l’acte d’accusation est une suite de suppositions hasardeuses. Une photo de Brunson avec un Kurde à l’écharpe rouge, jaune et verte (les couleurs du PKK, parti interdit en Turquie) « peut être interprétée comme un engagement dans des activités illégales sous couvert d’une activité de missionnaire ». Un texto envoyé par le pasteur à des proches à la veille de la tentative de coup d’Etat, leur conseillant de dormir habillés car « les secousses sismiques sont fréquentes dans la région », est assimilé à une allusion cryptée à l’imminence du putsch. Quant aux témoins cités, presque tous anonymes, ils tiennent des propos fantaisistes. L’un d’eux prétend ainsi qu’un « missionnaire israélien » lui aurait confié avoir appris que le pasteur avait participé, en début de 2013, à la préparation des manifestations du parc Gezi, à Istanbul, un mouvement anti-Erdogan violemment réprimé, à Istanbul et ailleurs.
Toujours d’après l’accusation, ses fréquentations laissaient à désirer. On lui reproche des liens présumés avec d’anciens officiers américains de la base aérienne d’Incirlik, au sud du pays, des membres de l’Eglise mormone, qui, selon la description d’un témoin anonyme, « avaient tous un doigt manquant sur une main ». La mention d’Incirlik renvoie tout droit au putsch raté. Utilisée par le Pentagone dans la lutte contre les djihadistes en Syrie, la base a prêté ses pistes à des avions de ravitaillement destinés aux militaires insurgés, la nuit du soulèvement. Fascinés par les théories du complot, les islamo-conservateurs au pouvoir y voient une preuve de plus de l’implication de la CIA dans la tentative de putsch. Le fait que Washington ait refusé d’extrader le prédicateur Gülen est un motif d’irritation supplémentaire.
Le pasteur Brunson est-il une monnaie d’échange, un otage ? M. Erdogan s’en défend. « La justice en Turquie est indépendante », répète-t-il à l’envi. Reste une petite phrase, qu’il avait prononcée en septembre 2017 lorsque, emporté par sa faconde, il avait ouvertement proposé d’échanger « le pasteur contre le prédicateur ».
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