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Le Figaro, le 19/12/2018
Par Julie Connan
À Istanbul et Gaziantep
REPORTAGE – Huit ans après le début de la guerre en Syrie, un demi-million de réfugiés vivent de l’autre côté de la frontière dans la grande ville turque. Leur intégration avançant, beaucoup n’envisagent plus de regagner leur pays à moyen terme.
Par-delà les énormes bobines de fils multicolores, le bruit lancinant de la tisseuse scande le travail de la petite vingtaine d’ouvriers affairés à leurs postes de travail: tissage, découpe, repassage, conditionnement, avant la mise en camion des tapis, prêts à quitter l’entrepôt, perdu dans le dédale industriel de Gaziantep, dans le sud-est de la Turquie. Ici, à 120 km d’Alep, la moitié de la vingtaine d’ouvriers sont des Syriens, à commencer par le directeur de l’usine Sidrahli, Firas Zatari. «À Alep, nous avions un business familial. Nous sommes arrivés ici en 2013 avec une seule machine.» Le choix de Gaziantep, où se trouvent 1864 compagnies syriennes, s’est imposé, et la vocation industrielle de la ville lui a simplifié la tâche. «Nous avons utilisé notre expérience et passé des mois à étudier les lois et les aides dont on pouvait bénéficier, avant d’ouvrir l’usine il y a six mois», raconte l’homme d’affaires devant ses échantillons chamarrés de fil. Toutes ses économies y sont passées. Aujourd’hui, il produit 3000 m2 de tapis par jour, exportés dans dix à quinze pays, surtout du monde arabe.
Dans les rues enlacées de la vieille ville de Gaziantep, qui faisait partie du vilayet d’Alep sous l’Empire ottoman, les boulangeries vendent du pain turc comme syrien. Environ 500.000 Syriens vivent dans la ville, sur un total de plus de 3,6 millions (4 millions avec les non-enregistrés) en Turquie, ce qui en fait le premier pays d’accueil de réfugiés au monde. D’après un rapport du Médiateur turc, ce chiffre pourrait monter à 5 millions d’ici à dix ans. «Les conditions nous ont forcés à travailler avec les Syriens, reconnaît Kürsat Goncu, secrétaire général de la chambre de l’industrie de Gaziantep, où beaucoup de réfugiés sont arrivés de la région d’Alep aux premières heures de la guerre. Début 2011, notre ville a accueilli l’équivalent d’un quart de sa population en deux mois. Vous pouvez imaginer les problèmes que cela a posés! Du jour au lendemain, ils ont utilisé nos routes, nos hôpitaux, nos mosquées… Mais notre responsabilité est de les intégrer. Ce sera possible une fois qu’ils auront des opportunités de travail.»
Face à cet état de fait, l’UE et la Turquie amorcent un changement de paradigme: plus de huit ans après le début de la guerre, il s’agit de passer d’une approche humanitaire de court terme à une approche de développement à plus long terme. Ankara a fermé cinq camps début septembre – il en reste encore 17 – et entrepris de reloger 34.180 Syriens dans des structures «en dur». Désormais, 94 % des Syriens vivent en dehors, principalement dans des appartements, sous un statut de protection temporaire. Mais selon la Brookings Institution, 67 % d’entre eux se trouvent sous le seuil de pauvreté.
Surmonter l’obstacle de la langue
De l’aveu de tous, la langue est un obstacle majeur à l’intégration. Pour surmonter cette barrière, qui apparaît dès les premiers formulaires à remplir, les plus chanceux ont reçu des formations linguistiques et techniques. Depuis février, l’Union européenne, le Bureau international du travail (BIT) et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) ont lancé un programme visant à renforcer la résilience des Syriens et des communautés turques d’accueil, à hauteur de 11,6 millions d’euros. L’objectif est de faciliter leur accès au marché du travail et de créer des opportunités d’emplois. Dans le cadre de l’accord entre Ankara et Bruxelles de mars 2016, qui a permis de freiner les arrivées de migrants sur les côtes grecques, 3 milliards d’euros ont commencé à être versés pour financer 72 projets. En mars dernier, la Commission a donné son feu vert pour une nouvelle aide de 3 milliards.
Au premier rang d’un petit amphithéâtre flambant neuf de la chambre de l’industrie de Gaziantep, Adnan Abdou el-Mohamed écoute avec attention un cours d’économie sur les risques liés aux exportations. À 44 ans, ce Syrien, arrivé il y a trois ans de Deir ez-Zor, prépare une nouvelle reconversion professionnelle. «Personne ne trouve de travail dans son domaine. Là -bas, j’étais technicien dans les communications. Ici, pour vivre, j’ai fondé une petite association humanitaire. Mais comme cela fait sept ou huit ans que les premiers Syriens sont arrivés, il y a moins de besoins humanitaires. Alors je vais essayer de me lancer dans l’exportation de matériaux de construction turcs vers les pays arabes», explique-t-il.
«Il y a deux millions de Syriens en âge de travailler en Turquie, mais ils ne sont souvent pas en mesure de le faire, pour des problèmes de langue ou d’éducation, 900.000 d’entre eux le peuvent réellement»
Sadettin Akyil, directeur général du BIT à Istanbul
«Il y a deux millions de Syriens en âge de travailler en Turquie, mais ils ne sont souvent pas en mesure de le faire, pour des problèmes de langue ou d’éducation, 900.000 d’entre eux le peuvent réellement, précise Sadettin Akyil, directeur général du BIT à Istanbul. Nous travaillons pour qu’ils intègrent le monde du travail. Le processus est long, mais il faut qu’ils puissent pourvoir à leurs besoins en dehors des aides.» L’ambition à terme est qu’ils n’aient plus besoin de l’aide qui permet actuellement à 1,5 million de réfugiés de toucher environ 20 euros par mois.
«Nous adaptons les formations en fonction des besoins des entreprises, précise Yusud Izzedin Iymen, secrétaire général adjoint de la chambre de l’industrie à Gaziantep, où des quartiers entiers sortent de terre. Cette année, nous avons dispensé 11 cours (comptabilité, programmation, construction, etc.) auxquels ont participé 220 Syriens et Turcs et nous les plaçons ensuite en entreprise.» La démarche n’est parfois pas sans écueils, quand il faut par exemple sensibiliser les «élèves» à la discipline des horaires. «Certains ne veulent pas toujours se couper la barbe ou enlever leur voile», glisse Yusud Izzedin Iymen.
Mais l’un des principaux biais du système reste le recours au travail au noir. Dans les entreprises, les Syriens se plaignent à mots couverts: tous ne sont pas déclarés, y compris quand l’employeur est syrien. «Il faut que l’accès aux permis de travail soit plus facile. C’est une démarche très lourde pour les Syriens, plaide Khaled Babbly, du Syrian Businessmen Association Board. Sa validité actuelle est d’un an renouvelable, mais il faut l’allonger.» Difficile d’obtenir des chiffres sur le travail informel, qui représente un tiers de l’économie turque. Selon certaines estimations, un demi-million de Syriens travailleraient au noir et seraient donc potentiellement exploités. Depuis janvier 2016, quelque 40.000 permis de travail ont été accordés à des Syriens dans tout le pays. Une goutte d’eau.
Dans la salle d’attente du centre de santé Tekstilkent, les enfants fiévreux et le regard vide patientent sur les genoux de leurs mères. Les locaux modernes de cette clinique, dirigée par un médecin turc, ressemblent à ceux d’un centre de santé classique, à un détail près: les patients sont syriens. Les professionnels de santé, eux, le sont à 70 % et donc arabophones. «L’ouverture de cette clinique a tout changé pour ma famille, explique Haydem Cebir, 34 ans, venu consulter pour une douleur à la poitrine. On se sent en confiance avec un médecin qui nous comprend. Avant, il fallait qu’on ait recours à un traducteur à l’hôpital public turc.» Ici les consultations sont gratuites, comme les médicaments.
Depuis fin 2016, Bruxelles et Ankara mettent aussi l’accent sur l’accès au système de santé pour les réfugiés: l’obstacle de la langue était générateur de tensions et d’engorgement dans les hôpitaux, quand les patients syriens s’y rendaient pour des «petits» maux. Pour alléger ce poids sur le système de santé, 300 millions d’euros sur trois ans ont été alloués par l’UE à la création de ce type de maisons de santé. Six ont été ouvertes à Gaziantep, deux autres le seront bientôt. Depuis deux ans, 20 médecins et 15 infirmières sont formés par mois dans huit villes turques, pour s’adapter au système de santé et aux prescriptions, avant d’être «certifiés» par le ministère de la Santé. À ce jour, un millier de médecins et 850 infirmières l’ont été.
Le sésame de la naturalisation
Pour beaucoup de ces professionnels de santé syriens, l’évolution est salutaire: elle leur permet de soigner les leurs et de lever «le fardeau sur leurs frères turcs». Mais cela génère aussi parfois des frustrations et un sentiment de déclassement. «Ça fait vingt-sept ans que je suis ORL. Pour travailler ici, j’ai dû réviser la médecine générale et la pédiatrie», explique le Dr Matasem Karabilou. «Moi, je suis gynécologue obstétricien, mais ici, je peux seulement examiner et prescrire, mais pas pratiquer d’accouchements. Ça me donne l’impression d’être un simple employé, confie le Dr Omar al-Mustafa, 44 ans, arrivé d’Alep fin 2015. L’UE et la Turquie font les choses à moitié. Il faut créer des cliniques spécialisées pour que nous puissions exercer en tant que spécialistes!» s’emporte-t-il.
Mais grâce à des facilités de passage et à sa nationalité turque récemment acquise, Omar al-Mustafa se rend en Syrie le week-end pour travailler dans la ville frontalière d’Azaz. Pour beaucoup, l’apprentissage de la langue et la naturalisation, accélérée pour les personnels qualifiés (40.000 Syriens ont été naturalisés à ce jour dans le pays), dessinent pourtant les contours d’un avenir en Turquie. Au centre Tekstilkent, la quasi-totalité des praticiens l’ont obtenue. «La naturalisation a changé ma vie. J’apprends le turc pour m’intégrer, explique Ela Nasif, obstétricienne. Je me sens plus stable et à même d’évoluer ici.»
«L’expérience montre qu’un réfugié met en moyenne quinze ans à décider ce qu’il va faire de son avenir»
Christian Berger, chef de la délégation européenne en Turquie
Après avoir passé des années, s’être «reconstruit», avoir eu des enfants en Turquie, ou les y avoir parfois scolarisés, de moins en moins de Syriens se voient à court terme rentrer, sinon dans leur ville, du moins dans leur pays d’origine. «Selon des études, 80 % d’entre eux ne veulent pas rentrer même si la sécurité est rétablie et 65 % ne veulent pas aller dans un autre pays que la Turquie», rapporte Inanç Sögüt, directeur de projet au ministère de la Santé. Les Syriens de Turquie ne veulent d’ailleurs plus être appelés «réfugiés»: Ankara et Bruxelles les appellent des «guests», des invités. «Mon avenir est ici, assure Adnan Abdou el-Mohamed. C’est une zone frontalière, nous partageons une histoire commune.» Firas Zatari, lui, se veut pragmatique: «Je suis un homme d’affaires. Je vis là où j’ai un business. Si la guerre finit demain, j’ouvrirai une usine là -bas et je garderai les deux.»
«L’expérience montre qu’un réfugié met en moyenne quinze ans à décider ce qu’il va faire de son avenir, précise Christian Berger, chef de la délégation européenne en Turquie. Nous reconnaissons l’effort considérable d’accueil du gouvernement et des populations turques, mais il faut trouver une solution politique en Syrie pour s’attaquer aux racines du problème.» En attendant, les conditions d’un retour massif sont loin d’être réunies alors que plane la menace d’une offensive sur la province limitrophe d’Idlib où vivent plus de trois millions de personnes, et un nouvel afflux massif de réfugiés dans la région de Gaziantep, aux premières loges.
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